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Maurice Couve de Murville 1989
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C’est en Mai 1943 que M. Maurice Couve de Murville rencontrait le Général de Gaulle. Fonctionnaire des Finances, il se voyait confier le poste de commissaire aux finances du Comité de libération nationale jusqu’en octobre 43 où Pierre Mendès France lui succédait. M. Couve de Murville était alors nommé au Conseil interallié de l’Italie occupée. Rome Libérée, il devenait l’ambassadeur de Italie. Ainsi débutait une carrière diplomatique qui allait être poursuivie sous la Présidence du Général, avant que M. Couve de Murville ne devienne son ultime Premier ministre. |
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« Au départ, le Général et moi étions en complet accord sur les grandes lignes de la politique étrangère. Pour les affaires au jour le jour, c’était moi qui traitais, bien sûr. Je le voyais tous les vendredis matin. C’était sacré ! Nous nous mettions alors d’accord sur les positions importantes à prendre ou à défendre. Et, évidemment, il y avait les très grandes affaires – plus rares – comme, par exemple, la sortie de l’OTAN. Là, c’était de Gaulle qui prenait les initiatives. Mais nous en parlions longuement, ne serait-ce que pour déterminer comment les choses devaient être faites. Pendant dix ans, nous avons ainsi réalisé bien des choses, y compris la chaise vide. C’était moi qui le lui avais proposé, alors qu’en juin 1965 nous étions à l’aube d’une période électorale… »
« Le Général n’était pas pour le régime des blocs qui signifiait l’assujettissement de l’Europe occidentale aux États-unis. Il n’approuvait pas non plus la politique de la guerre froide, qui ne menait à rien. Personne n’avait envie de se faire la guerre avec des armes nucléaires. De Gaulle était désireux que les pays se libèrent de la tutelle des grandes puissances et que tous puissent reprendre entre eux des relations normales. C’était sa philosophie fondamentale.
Cette volonté politique encourageait de Gaulle à chercher à organiser la détente et à établir des relations plus normales de l’Atlantique à l’Oural. Mais, très vite, il y eut le limogeage de Khrouchtchev, remplacé par Brejnev, l’archétype même du conservateur. Tout devenait alors plus difficile. La visite en Russie, en 1966, n’a abouti à aucun résultat concret. Ensuite, a eu lieu le blocage du printemps de Prague, qui a tout arrêté. Ce qui est caractéristique des réaction du Général à cette époque, c’est le communiqué – rédigé à la Boisserie avec Debré et moi – après le coup de Prague : il parlait du retour de Yalta. C’est dans son esprit ce qui caractérisait le piétinement. De Gaulle avait dit que la Russie (il disait toujours la Russie, et non l’Union soviétique ou l’URSS) aurait des problèmes avec les pays musulmans du Caucase et de l’Asie centrale ; cela ne fait que commencer, c’est la grande affaire de l’URSS pour les années qui viennent. »
« Ils ont été difficiles parce que de Gaulle s’opposait à toute espèce d’hégémonie. Les Américains réagissaient vivement – et les autres pays Occidentaux avec eux – mais, au bout d’un certain temps, ils se ralliaient. Sur ce plan, l’affaire de la sortie de l’OTAN était assez extraordinaire. Au bout de quelques années, les Etats-Unis ont reconnu que ce que de Gaulle avait fait n’avait en rien affaibli la défense occidentale, et que la France avait un armement atomique valable. Ils acceptaient que toutes leurs troupes soient évacuées de France et que les nôtres en Allemagne ne soient plus sous leur commandement.
De Gaulle trouvait stupide de faire comme si la Chine populaire n’existait pas, sous prétexte de l’existence d’un gouvernement de Taiwan. Nixon était cent pour cent d’accord. Il a suivi et établi des rapports.
« Il est vrai que c’était largement sous le coup de l’émotion. Non par analogie avec le Parti québécois, mais par analogie avec l’expression France Libre. Le discours de Phnom-Penh était, par contre, bien préparé. Nous l’avions vu et revu dans l’avion. C’était une opération politique absolument préméditée, et justifiée, à mon avis. Cela nous a fait prendre une position dans le bon sens, avec un peu d’effet, à la longue, sur les positions américaines. Nixon était tout à fait d’accord. Par la suite, c’est lui qui a engagé des pourparlers de paix avec le Viêt-nam ». |
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