Communiqué du 17 janvier 2008

 

Le PS donne un spectacle affligeant ... et vient en aide à Sarkozy

 
  • L'Assemblée nationale a rejeté la voie du référendum pour ratifier le traité de Lisbonne

Les députés ont repoussé par 176 voix (UMP, NC) contre 140 (PCF, PS, Verts, Radicaux de gauche) la proposition de loi constitutionnelle communiste visant à consulter directement les électeurs sur le traité européen. Les Français avaient dit non à 55% au traité constitutionnel européen le 29 mai 2005.

Le parti socialiste divisé

Le PS va tenter de résoudre la quadrature du cercle : comment dire "oui" (sa position majoritaire) sans cautionner le mode de ratification parlementaire voulu par le chef de l'Etat. Les députés socialistes doivent se pencher sur une proposition de Jean-Marc Ayrault qui les divise et décider s'ils boycottent ou non le congrès constitutionnel de Versailles du 4 février pour protester contre le mode de ratification parlementaire - quitte à dire oui au traité par la suite au Parlement.

Cette position a suscité la colère des "nonistes", qui espèrent encore réunir à Versailles une minorité de blocage des deux cinquièmes pour torpiller le processus  parlementaire et contraindre le chef de l'Etat à un référendum. Le premier secrétaire François Hollande a annoncé lundi qu'il n'y aurait pas de boycott du Congrès sans "position unanimement partagée".

  • Scrutin public sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution – Modification indispensable pour la ratification du traité de Lisbonne -  Vote des députés (liste complète) et texte voté.

  • Henri Emmanuelli fustige les divisions de son camp sur le traité et le Congrès de Versailles :

Député (PS) des Landes, Henri Emmanuelli s’oppose farouchement au boycott du Congrès. Il a réuni le 15 janvier des parlementaires socialistes pour exiger un référendum.

Comment jugez-vous l’annonce faite par Jean-Marc Ayrault d’un boycott du Congrès ?

Je la juge incompréhensible. Je comprends que le parti soit divisé sur l’adoption du traité, puisqu’il l’était déjà. Mais on ne peut remplacer un référendum qui a déjà eu lieu par un vote parlementaire. Le PS ne peut donc renoncer à exiger la tenue de ce référendum. Et le seul moyen de l’obtenir, comme nous nous y étions engagés lors des campagnes présidentielle et législative, c’est d’aller à Versailles voter contre la révision. Je ne comprends pas qu’on laisse les mains libres au Président dès lors qu’il s’agit du respect d’un principe fondamental, le suffrage universel.

Alors, pourquoi cette annonce ?

Je ne me l’explique pas. Et c’est là qu’on retombe sur le problème d’une cohérence minimum. La liberté de conscience sur le traité lui-même, c’est-à-dire sur le oui et le non, difficile de faire autrement. En revanche, s’agissant du référendum, je ne vois pas pourquoi il y aurait finalement liberté de conscience. Si des socialistes ne situent plus la légitimité politique dans le suffrage universel, qu’ils le disent et l’assument ouvertement. Mais je ne pense pas qu’il puisse y avoir d’ambiguïté sur ce sujet.

Comment réagissez-vous aux propos de François Hollande qui a fustigé le «jeu» des opposants au boycott ?

C’est grave. S’il considère que la défense de la souveraineté populaire est une affaire de posture ou de tactique, c’est le signe d’une légèreté inquiétante. En politique, il faut avoir un minimum de cohérence. Et je parle bien d’un minimum. En 2005, j’ai fait campagne pour le non. Et je sais que ceux qui l’ont menée pour le oui n’ont jamais admis le vote du peuple français. Mais qu’ils aient le courage de le dire, et qu’ils arrêtent d’expliquer que ceux qui veulent le faire respecter sont des tacticiens.

Que pensez-vous de la position de Ségolène Royal qui, après avoir défendu le référendum, estime désormais qu’il faut adopter le traité ?

Si l’on explique "Nicolas Sarkozy a été élu, l’affaire est réglée", je ne vois pas alors ce qu’on fait à l’Assemblée nationale. Et ce, d’ailleurs, sur tous les sujets. Pourquoi s’opposer, alors ? On en arrive à des raisonnements ahurissants pour justifier l’injustifiable. J’ai envie de dire : "pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils disent…".

Concrètement, les socialistes pourront-ils se doter d’une position commune ?

Je crois que non. Mais on peut élargir : y a-t-il une position du PS sur la politique internationale ? La mondialisation ? La croissance ? Ce n’est pas le seul sujet sur lequel le parti n’a pas de position. Le PS ne manque pas de propositions, mais de cohérence.

Quel est l’impact de cette affaire dans l’opinion publique ?

Une fois de plus, nous donnons un spectacle affligeant. Entre l’improvisation, les avancées et les reculs, le manque de lucidité, on donne l’impression de subir les événements politiques. Cela commence à faire beaucoup.

Quel remède, alors ?

Ce que je vais proposer, c’est qu’après le prochain congrès socialiste, le futur ou la future premier secrétaire s’achète une boussole. En souvenir de Sénèque, qui, il y a fort longtemps, nous expliquait qu’il n’y a pas de bon vent pour le marin qui ne sait pas où il va…