Éditorial

 

A la recherche de l'Europe de demain.
 

  • n°24 du
    20
    /12/2004

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D’après le dernier sondage CSA, à peine 27% des Français se déclarent intéressés par le débat sur le traité constitutionnel européen qui sera soumis à ratification par voie référendaire en 2005.

Pour beaucoup de nos concitoyens, la complexité du sujet alimente ce désintérêt, mais il convient aussi de noter ce sentiment d’impuissance qui se manifeste : quoi qu’ils fassent ou pensent, les dés sont jetés. Enfin, et la responsabilité des médias sur ce point est évidente, la diabolisation du vote négatif est particulièrement pesante : dire non à ce traité, c’est être un anti-européen primaire et ringard.

Et pourtant, le débat existe. Il aurait pu, et pourrait encore, être enrichissant pour tous s’il proposait les deux conceptions possibles pour le projet européen :

  •  l’approche fédéraliste ou supranationale, celle de Valéry Giscard D’Estaing,

  • une organisation confédérale fondée sur la coopération inter-nations, celle prônée en son temps par le général de Gaulle et défendue aujourd’hui par ses véritables héritiers.

Ce n’est certainement pas le concept « Fédération d’Etats-Nations » cher au Président Chirac qui peut donner de la couleur à cette campagne d’explication ; personne ne l’a jamais défini et son appellation est en elle-même une contradiction flagrante.

Si peu de Français se sentent concernés par ce projet constitutionnel, il semble que l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, aussi lointaine qu’on veut bien nous la présenter, fait réagir un plus grand nombre de nos concitoyens. Tous les sondages indiquent une même tendance. La très grande majorité des Français ne veut pas d’une intégration de la Turquie dans l’Europe et souhaite pour cette grande nation et les autres pays méditerranéens des liens forts et privilégiés.

A partir de ces quelques considérations, le véritable débat sur l’avenir de l’Europe peut être engagé : quelle Europe voulons-nous ?

  • Quelles valeurs veut-elle défendre ?

  • Quelles frontières, géographiquement parlant, sont pertinentes ?

  • Quelles relations souhaite-t-elle établir avec les autres Nations ?

  • Veut-elle être une autre référence que celle impérialiste des Etats-Unis ?

  • Saura-t-elle faire coopérer les Nations qui la composent sans les affaiblir, sans les détruire ?

Les partisans du « OUI » à cette constitution, PS-Verts, UMP et UDF confondus, s’organisent aujourd’hui autour d’un thème central : ne pas mélanger les deux problèmes, la constitution européenne et l’élargissement à la Turquie, le refus du second pouvant peser sur le premier.

Mais en réalité, ces deux questions sont-elles si indépendantes l’une de l’autre ? NON.

  • Le traité constitutionnel organise l’Europe sur une base fédérale et supranationale incompatible avec la souveraineté des Etats qui la composent ;

  • A 25, la problématique est déjà difficile, mais à 27, 28, voire 30 dans quelques années, comment cette nébuleuse organisation fonctionnera-t-elle ?

  • L’adhésion de la Turquie induira une légitime vocation pour d’autres Nations à suivre sa trace.

  • Tout le monde comprend que cette fuite en avant est un piège. Dans ces conditions, l’Europe ne deviendra jamais une Europe puissance. Il y en a, outre-Atlantique, qui rêvent de prolonger leur statut de seule super-puissance.

  • La décision de reculer de 10 ou 15 ans (voire 20) la décision de l’adhésion de la Turquie par voie référendaire, est une tromperie. Elle a été adoptée ce 17 décembre, la négociation « qui sera longue et difficile » comme nous le répète inlassablement le Président de la République, n’est, en fait, qu’une feuille de route identifiant le contenu de la mise en conformité de la Turquie aux textes – si nombreux, que chacun peut s’interroger légitimement sur leur utilité – régissant l’Union Européenne.

 Les dés en sont jetés. Accepter l’adhésion de la Turquie qui ne reconnaît même pas l’un des Etats-membres de l’UE (Chypre) est « abracadabrantesque ».

Face à cette situation que l’on veut nous imposer, ne reste plus que la solution du double-NON :

  • Non à ce projet constitutionnel afin de mettre en chantier un nouveau projet, simple, clair, compréhensible de tous pour une Europe des Nations ;

  • Non à l’intégration de la Turquie afin d’établir des limites géographiques pertinentes à l’Europe, celle-ci ne pouvant avoir vocation à une extension sans fin, sinon au risque de devenir un aggloméra sans âme et uniquement marchand.

« La prévision à moyen terme (une ou deux décennies), c'est que l'Union européenne sera certes un grand espace économique mais une zone en cours de balkanisation généralisée, de communautés hostiles les unes aux autres, pour des raisons sociales, ethniques, religieuses. D'une certaine manière, l'éclatement de la Yougoslavie apparaîtra comme une anticipation barbare et extrême du destin de cette Europe qui avale de l'espace, fabrique des règlements, des institutions, sans prise sur la réalité. La machine européenne sait déconstruire le réel existant mais elle ne fabrique que du virtuel ! Et du marché qui accélère (parce qu'il n'y a ni politique économique commune ni harmonisation sociale et fiscale) la déconstruction. Seuls les rêveurs, les phraseurs ou les menteurs peuvent affirmer que cette Union-là sera capable d'élaborer – à 25, à 30, et bientôt Turquie comprise ! – une politique extérieure et une politique de défense communes. Au mieux, l'une des succursales – plus ou moins autonome – de l'Otan ». précise Max Gallo dans une rubrique ‘intitulée « Faut-il craindre une balkanisation de l’Europe ? Impasse ou impostures »[17 décembre 2004]

 En disant NON,
les Français donneront à la France et
à l’Europe une nouvelle chance
et un nouveau départ.