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Ce n’est pas en ratifiant le protocole de
Londres
que la France assurera son « retour » en Europe
Face
à la tentation du gouvernement de ratifier le
"protocole de
Londres" instaurant un brevet européen néfaste pour la langue et
l’économie françaises, Nicolas Dupont-Aignan, député NI et président du
mouvement gaulliste "Debout la République" lance un appel à la
résistance. Il a adressé une lettre en ce sens au président de la
République
et appelle tous les membres et amis de DLR
à signer la
pétition en
ligne
créée par des professionnels de la traduction"
Au mépris de notre tradition institutionnelle (qui
veut, depuis François Ier, que l’unique langue reconnue et utilisée par
l’Etat est le français), de la protestation de plus de 200
parlementaires toutes étiquettes confondues et de l’hostilité unanime
des institutions autorisées (Conseil supérieur de la propriété
intellectuelle, Académie des sciences morales et politiques, Académie
française…), le gouvernement de Lionel Jospin a signé en juin 2001 un
protocole (dit « de Londres ») dont la mise en œuvre consacrerait
davantage l’hégémonie de l’anglais dans la vie économique française et
européenne. En effet, dans ce système, les brevets n’auraient plus
l’obligation d’être traduits en français pour s’appliquer dans notre
pays. Depuis, avec beaucoup d’autres de droite comme de gauche, j’en ai
combattu la ratification au Parlement, régulièrement remise à l’ordre du
jour sous la pression des milieux d’affaires, français, communautaires
et internationaux. Le Président Chirac a lui-même manifesté à plusieurs
reprises son opposition à ce protocole. Aujourd’hui, ce dossier resurgit
une fois de plus, porté cette fois directement par Valérie Pécresse et
Jean-Pierre Jouyet. Les deux ministres invoquent la modernisation
économique de la France et la relance de la construction européenne
(Le Monde daté du 11
juillet 2007).
Le gouvernement doit-il céder ou défendre notre
premier bien commun, le français ? Une précision préalable : le
protocole de Londres n’est en aucune sorte lié à des engagements au sein
de l’UE, il s’agit d’un accord interétatique que chaque pays peut, ou
non, ratifier en toute souveraineté. Inutile, donc, de se retrancher
derrière l’alibi communautaire ni derrière le prétexte d’un isolement de
la France en Europe, nombre de nos partenaires résolus à défendre leur
propre langue et leur économie (Italie, Espagne, Belgique, Portugal et
Autriche) ayant trouvé, eux, la force morale de refuser le funeste
protocole. Funeste car les brevets déposés par les entreprises
n’auraient plus l’obligation d’être rédigés dans la langue du pays où
ils s’appliquent. Résultat, ces dernières privilégiant par souci de
commodité la langue dominante, le protocole de Londres aggraverait de
facto la suprématie de l’anglais. Au plan économique d’abord : comment
ignorer que l’anglais deviendrait l’unique langue de référence en
matière technique et industrielle au détriment de la capacité
d’innovation des sociétés françaises, notamment les PME qui ne peuvent
consacrer autant de temps et d’argent à la surveillance et à la
traduction de l’avalanche de brevets en anglais qui s’imposeraient tout
à coup à elles ? N’oublions pas non plus le rude coup porté au français
en lui-même : faire tomber en désuétude notre langue dans la désignation
des nouveautés scientifiques et techniques, serait admettre sans le dire
la perte progressive de son statut international. Au total, ce serait ni
plus ni moins accepter d’en faire à moyen terme une langue morte.
Juridiquement, ensuite. Le brevet étant un contrat générateur de droits
opposables à tous, il va de soi que nos compatriotes pâtiraient d’une
inégalité en terme d’accès à l’information. Quant aux traductions
résumées dont se chargerait à ses propres frais l’Institut national de
la propriété industrielle, elles ne pèseraient rien en droit face au
texte d’origine en anglais. De plus, le coût de traduction, jusqu’à
présent assumé par les entreprises elles-mêmes, serait indirectement
supporté par la collectivité, dispensant les multinationales étrangères
des dépenses correspondantes, dérisoires au regard de leurs moyens
financiers. Enfin, source de confusion, ces traductions a minima
conduiraient fatalement à des querelles byzantines et à d’interminables
conflits d’interprétation juridique, sans même parler de la perspective
effrayante de confier à la Cour Européenne de Justice la mission de
trancher les litiges afférents.
En effet, la culture d’entreprise anglo-saxonne
s’inscrit dans une logique de prédation juridique, qui conduit les
firmes à multiplier tous azimuts le dépôt de brevets, dans l’espoir
d’étouffer la concurrence. L’application du protocole de Londres leur
permettrait de faire acquérir force de loi à des dizaines de milliers de
brevets que l’obstacle de la langue (le coût des traductions) a jusqu’à
présent tenu à distance. Avec ce brevet européen, l’accroissement des
conflits juridiques serait sans fin, disqualifiant peu à peu les avocats
d’affaires de langue française (puisque les textes seraient pensés et
rédigés en anglais), puis à terme les ingénieurs français dans nos
propres entreprises (ceux-ci ne pouvant comprendre la réalité des
inventions et procédés décrite dans la langue de Shakespeare). « La
France est de retour en Europe ! » proclame le gouvernement. Pourtant,
ce n’est pas en laminant le français et notre économie pour faire
plaisir à quelques multinationales et au MEDEF, qu’il servira cette
noble cause.
Nicolas
DUPONT-AIGNAN
Député DLR de l’Essonne
Président de Debout
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