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1er septembre 2007

 

Brevet européen : le français et nos PME toujours menacés !

 

Ce n’est pas en ratifiant le protocole de Londres
que la France assurera son « retour » en Europe

 

Face à la tentation du gouvernement de ratifier le "protocole de Londres" instaurant un brevet européen néfaste pour la langue et l’économie françaises, Nicolas Dupont-Aignan, député NI et président du mouvement gaulliste "Debout la République" lance un appel à la résistance. Il a adressé une lettre en ce sens au président de la République et appelle tous les membres et amis de DLR à signer la pétition en ligne créée par des professionnels de la traduction"

 

Au mépris de notre tradition institutionnelle (qui veut, depuis François Ier, que l’unique langue reconnue et utilisée par l’Etat est le français), de la protestation de plus de 200 parlementaires toutes étiquettes confondues et de l’hostilité unanime des institutions autorisées (Conseil supérieur de la propriété intellectuelle, Académie des sciences morales et politiques, Académie française…), le gouvernement de Lionel Jospin a signé en juin 2001 un protocole (dit « de Londres ») dont la mise en œuvre consacrerait davantage l’hégémonie de l’anglais dans la vie économique française et européenne. En effet, dans ce système, les brevets n’auraient plus l’obligation d’être traduits en français pour s’appliquer dans notre pays. Depuis, avec beaucoup d’autres de droite comme de gauche, j’en ai combattu la ratification au Parlement, régulièrement remise à l’ordre du jour sous la pression des milieux d’affaires, français, communautaires et internationaux. Le Président Chirac a lui-même manifesté à plusieurs reprises son opposition à ce protocole. Aujourd’hui, ce dossier resurgit une fois de plus, porté cette fois directement par Valérie Pécresse et Jean-Pierre Jouyet. Les deux ministres invoquent la modernisation économique de la France et la relance de la construction européenne (Le Monde daté du 11 juillet 2007).

  • Qu’on ne s’y trompe pas, ces deux arguments sont des leurres, qui masquent en réalité la volonté de certains intérêts privés d’imposer l’anglais comme unique langue des affaires.

Le gouvernement doit-il céder ou défendre notre premier bien commun, le français ? Une précision préalable : le protocole de Londres n’est en aucune sorte lié à des engagements au sein de l’UE, il s’agit d’un accord interétatique que chaque pays peut, ou non, ratifier en toute souveraineté. Inutile, donc, de se retrancher derrière l’alibi communautaire ni derrière le prétexte d’un isolement de la France en Europe, nombre de nos partenaires résolus à défendre leur propre langue et leur économie (Italie, Espagne, Belgique, Portugal et Autriche) ayant trouvé, eux, la force morale de refuser le funeste protocole. Funeste car les brevets déposés par les entreprises n’auraient plus l’obligation d’être rédigés dans la langue du pays où ils s’appliquent. Résultat, ces dernières privilégiant par souci de commodité la langue dominante, le protocole de Londres aggraverait de facto la suprématie de l’anglais. Au plan économique d’abord : comment ignorer que l’anglais deviendrait l’unique langue de référence en matière technique et industrielle au détriment de la capacité d’innovation des sociétés françaises, notamment les PME qui ne peuvent consacrer autant de temps et d’argent à la surveillance et à la traduction de l’avalanche de brevets en anglais qui s’imposeraient tout à coup à elles ? N’oublions pas non plus le rude coup porté au français en lui-même : faire tomber en désuétude notre langue dans la désignation des nouveautés scientifiques et techniques, serait admettre sans le dire la perte progressive de son statut international. Au total, ce serait ni plus ni moins accepter d’en faire à moyen terme une langue morte. Juridiquement, ensuite. Le brevet étant un contrat générateur de droits opposables à tous, il va de soi que nos compatriotes pâtiraient d’une inégalité en terme d’accès à l’information. Quant aux traductions résumées dont se chargerait à ses propres frais l’Institut national de la propriété industrielle, elles ne pèseraient rien en droit face au texte d’origine en anglais. De plus, le coût de traduction, jusqu’à présent assumé par les entreprises elles-mêmes, serait indirectement supporté par la collectivité, dispensant les multinationales étrangères des dépenses correspondantes, dérisoires au regard de leurs moyens financiers. Enfin, source de confusion, ces traductions a minima conduiraient fatalement à des querelles byzantines et à d’interminables conflits d’interprétation juridique, sans même parler de la perspective effrayante de confier à la Cour Européenne de Justice la mission de trancher les litiges afférents.

  • Enfin, la mise en œuvre de ce protocole constituerait un formidable appel d’air pour tous les brevets des firmes américaines et asiatiques, qui n’attendent que cela.

En effet, la culture d’entreprise anglo-saxonne s’inscrit dans une logique de prédation juridique, qui conduit les firmes à multiplier tous azimuts le dépôt de brevets, dans l’espoir d’étouffer la concurrence. L’application du protocole de Londres leur permettrait de faire acquérir force de loi à des dizaines de milliers de brevets que l’obstacle de la langue (le coût des traductions) a jusqu’à présent tenu à distance. Avec ce brevet européen, l’accroissement des conflits juridiques serait sans fin, disqualifiant peu à peu les avocats d’affaires de langue française (puisque les textes seraient pensés et rédigés en anglais), puis à terme les ingénieurs français dans nos propres entreprises (ceux-ci ne pouvant comprendre la réalité des inventions et procédés décrite dans la langue de Shakespeare). « La France est de retour en Europe ! » proclame le gouvernement. Pourtant, ce n’est pas en laminant le français et notre économie pour faire plaisir à quelques multinationales et au MEDEF, qu’il servira cette noble cause.

Nicolas DUPONT-AIGNAN
Député DLR de l’Essonne
Président de D
ebout la République