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Nous devons bâtir ce rassemblement républicain moderne, novateur, qui ne craint pas l'Europe parce qu'il défend la France!

François Morvan
Président de "Vive la République"

 

Chers amis,

Je ne vous dissimulerai pas mon plaisir d'être à nouveau avec vous aujourd'hui.

Nous en effet savons les uns et les autres quelle importance a tout point de vue a revêtu la bataille politique contre la Constitution Européenne. Et notre rencontre dans cette lutte a révélé, je le crois, au delà de nos différences d'origine ou de sensibilité, une vraie convergence de vue dans des domaines essentiels.

L'oligarchie qui domine n'a rien compris ou pire encore, elle a parfaitement compris mais cherche désespérément comment se débarrasser du problème qui lui est posé. Elle ne comprend pas cependant que le roi est nu et que ça se voit.

Les françaises et les français ont émis tout le contraire d'un vote nihiliste ou corporatiste. C'et un vote de raison, motivé, et si on cherche à bien le comprendre, tout en nuances.

On ferait je crois, un premier contresens si l'on interprétait le vote du 29 mai comme un refus en bloc de la "mondialisation".

Nos concitoyens comprennent parfaitement que la nouvelle phase des échanges mondiaux est facteur de progrès pour nous comme pour les pays émergents. Une formidable révolution des forces productives est en marche, qui n'a d'équivalent récent dans l'histoire de l'humanité que la période de l'invention de l'imprimerie.

Nos concitoyens savent que l'économie de marché est le moteur de cette révolution, parce qu'elle permet l'initiative, l'expérimentation, la prise de risque, la circulation de l'expérience et des savoirs.

Mais nos concitoyens ne veulent pas qu'on confonde le moteur et le pilote, et que nous soyons embarqués dans une voiture folle sans direction et sans but. Autrement dit , ce qu'ils refusent, c'est une caractéristique majeure de cette mondialisation, qui est le prise du pouvoir par le capital financier à court terme. Ils veulent du progrès, ils ne veulent pas de la jungle. Une économie de marché oui, mais une politique économique qui l'encadre.

Autrement dit, ce que les françaises et les français refusent , c'est de ce dogme commun aux archéo-marxistes et aux post-modernes, selon lequel toute la société ne serait que de l'économie concentrée. Une économie de marché, oui. Une société de marché , non.

C'est le mérite clair du "non de gauche" d'avoir dénoncé avec force la jungle économique et d'avoir donné au "non" la dynamique sociale dont il avait besoin.

Mais aussitôt ce "non de gauche" démontre ses limites. Ses divisions, ses chamailleries sont symptomatiques de ce qu'il ne sait que faire d'une victoire qui devrait pourtant être aussi la sienne.

C'est que le "non de gauche" est doublement à contresens : il reste hostile à la nation sur le plan politique et en conséquence, il ne nous dit pas qui va être le pilote politique que les français réclament. La seule réponse en leur sein, celles de ceux qui sont "fédéralistes" sur le plan européen et reprochaient en quelque sorte à la Constitution de ne pas aller assez loin a, on le comprend, du plomb dans l'aile pour un moment. Et d'un autre côté, le "non de gauche" reste majoritairement hostile idéologiquement à l'économie de marché, n'ayant pas encore digéré toutes les conséquences de l'échec socialiste du XX° siècle. Le non de gauche n'est donc pas en situation de répondre politiquement aux français, même si je pense, et nous devons l'intégrer, qu'il est une des composantes de cette réponse.

On commettrait un deuxième contresens si on interprétait ce vote comme un refus en bloc de l'Europe, et nous l'avions parfaitement anticipé dans notre campagne : "J'aime l'Europe, je vote non".

Précisément en raison de ce contexte de mondialisation des échanges, l'espace européen est perçu comme une nécessité d'échelle. Un monde multipolaire, c'est bâtir des contrepoids aux géants d'aujourd'hui (les USA) et de demain (la Chine, l'Inde, la Russie reconstruite). Chacun comprend que la France n'a pas la puissance requise pour exercer à elle seule ce contrepoids ; mais pour autant, l'indépendance de la France, sa liberté d'initiative sont un levier dans cette direction.

Autrement dit, ce que veulent nos concitoyens, c'est une Europe qui soit démultiplicatrice de la puissance française, une Europe de synergie des puissances nationales, alors que l'Union Européenne dans ses modalités actuelles leur est antagonique, et constitue donc un affaiblissement.

De ce point de vue, le vote des Français n'est pas un vote souverainiste au sens où les français ne croient pas à la souveraineté nationale conçue comme un retour et comme un remède en elle-même.

Les françaises et les français veulent l'indépendance de la France, mais pour l'Europe et pour le monde. Et ils conçoivent que l'Europe soit non pas un abandon de souveraineté à une instance supra-nationale, par définition anti-démocratique, mais un partage de souveraineté. Ainsi par exemple l'Euro est-il l'objet de sentiments contradictoires : d'un côté c'est un facteur de vie chère et de croissance bloquée compte tenu de la politique, de l'absence de politique doit-on dire, de la B.C.E.. Mais de l'autre, nos concitoyens pressentent que ce pourrait être, entre les mains d'un groupe d'Etats décidés, un puissant instrument de rééquilibrage du monde qui vit encore sous la dictature factice du dollar-papier, dont la puissance ne repose plus sur un étalon mesurable, mais sur la prosternation à ses pieds des européens et sur la planche à billets de la Réserve Fédérale, et qui permet aux Etats-Unis d'aujourd'hui d'être un colosse aux pieds d'argile qui survit aux dépends du monde, comme de la misère d'une partie de son peuple. Mais un tel rééquilibrage du désordre monétaire exige précisément un rapport de force qu'une France qui déciderait d'en revenir au Franc ne serait pas en mesure d'imposer seule.

Par ce vote, enfin, les Français ont renouvelé l'expression de leur lassitude de la politique institutionnelle et de la stérilité du débat des faux-frères-ennemis UMP/PS. Ils ont dans les faits assumé la convergence des "non", et leur vote a montré que les non n'était pas "incompatibles" comme l'a dit l'Arlésienne, mais complémentaires.

La victoire du "non"a fait une nouvelle fois voler en éclats le système établi; mais il nous oblige donc en retour a de l'audace, toujours de l'audace, encore de l'audace, c'est à dire à une traduction politique dont il soit bien clair qu'elle ne se nourrit pas à la soupe... impopulaire.

Il s'agit d'abord et avant tout d'un programme de fond reposant sur le réservoir d'énergie nationale et républicaine, c'est à dire celle qui demande des efforts à tous mais qui garantit que ceux-ci bénéficieront à tous.

- un nouveau pacte social dont le pivot ne peut être que les PME et les salariés.

- un emprunt massif public, national et européen, pour les grands travaux, les transports à grande vitesse , le ferroutage, l'énergie, la recherche biotechnologique, investissant pour les cinquante ans qui viennent et créant les emplois du futur. Un tel emprunt public bâti et garanti en commun par des Etats européens librement associés et décidés serait la base d'un véritable new deal à l'échelle européenne, au lieu d'abandonner l'épargne populaire à la logique stérile des fonds de pension. Devant une telle initiative, la Banque centrale Européenne devrait se soumettre ou se démettre.

- un effort de rénovation de l'Etat et des services publics, qui ne peut réussir qu'en s'appuyant sur les citoyens, fonctionnaires et usagers. Cela implique, oui, d'y introduire partout l'efficience, la récompense de l'effort et de l'initiative, la productivité du travail. Mais la condition, c'est qu'une telle révolution soit au service d'un objectif : redonner à l'Etat ses marges de manoeuvre au service de tous et non pour brader ses richesses. Redonner au service public le rapport qualité/prix qu'on est tous en droit d'exiger, non pour aller vers son morcellement et sa privatisation, mais pour en faire le ciment renouvelé de notre cohésion sociale.

- une politique de croissance et d'échange en Europe et pour l'Europe, et non pas ce ventre mou ouverts à tous les vents qu'on a voulu nous vendre dans un emballage de contrebande. Cela implique sa redéfinition en trois zones articulées : son centre, groupes d'Etats fondateurs du marche commun et proches par leur niveau social. Son deuxième cercle, celui des nouveaux arrivants avec lequel il faut définir les écluses pour qu'ils rejoignent progressivement le premier groupe; la périphérie, celle du Maghreb, du Proche-Orient, de la Russie, de l'Afrique, qui attendent et espèrent en une alternative à la logique prédatrice nord-américaine.

Tous ces projets impliquent la refondation de l'alliance franco-allemande. L'Allemagne parvient , après un siècle de convulsions, à la maturité nationale. Et avec des problèmes sociaux, démographiques, industriels qui sont, malgré une trajectoire bien différente, désormais similaires aux nôtres. Une telle politique permettra de d'ancrer définitivement l'Allemagne dans la modernité, et partant de tendre la main à Moscou rassuré et à Pékin pour ce monde multipolaire, qui n'est pas le libre marché sauvage, mais celui d'un nouvel équilibre entre puissances raisonnées.

Les électeurs du "non" attendent à ce qu'on s'adresse à eux tous, pour les rassembler tous.

Quelque soit la famille idéologique à laquelle on appartient, il n' y a que cette démarche ouverte, dynamique, novatrice, bouleversante qui pourra convaincre.

Autant dire que les logiques "plus à gauche que moi tu meurs", ou "plus à droite que moi tu meurs" sont mort-nées.

Ce que nous propose par exemple Philippe de Villiers, c'est pour toute perspective de brider l'Union Européenne actuelle tout en continuant la logique de la privatisation des services publics, comme dans le cas de l'Assurance-maladie et dit-il "autant que possible" dans tous les autres cas. En quelque sorte ce serait la poursuite de l'ultra-capitalisme financier, mais bien de chez nous, assorti du rassemblement de la droite sectaire. C'est une impasse, elle retransformera Philippe De Villiers, dont il faut saluer la campagne intelligente et dynamique pour le non, en témoin du passé.

Et on en dira autant de Laurent Fabius, qui a apporté au "non" un décisif bagage d'homme d'Etat, mais qui perdra l'aura qu'il a ainsi gagné, si il continue à s'enfermer dans la gauche de la gauche, en voulant imiter le coup du père François de 1981, mais dans un contexte et avec des partenaires qui ne sont plus les mêmes.

Ce que veulent les françaises et les français c'est au contraire un nouvel élan pour toute la France et pour l'Europe. Pour la France, un nouveau départ qui s'appuie sus ses atouts nationaux et historiques, et pour l'Europe un changement radical de politique, qui permette à toutes ses Nations de s'inscrire dans la mondialisation en en changeant le cours au lieu de la subir.

C'est pourquoi nous devons assumer pleinement nos responsabilités. Nous devons bâtir ce rassemblement républicain moderne, novateur, qui ne craint pas l'Europe parce qu'il défend la France.

Soyons hardis, et comme on n'est jamais aussi malin qu'en donnant des conseils aux autres, je voudrais me permettre de dire à Nicolas : vas - y ! Ne laisse pas la place libre au débat entre trompe- l'oeil entre le populisme financier qui nous annonce en fait un retour à l'Ancien Régime et les brissotins qui au fond voudraient continuer à godiller sans ne rien choisir.

Dis-leur à tous que tu seras un pivot irréductible de ce projet et de cette vision, et nous avec toi.

Merci !