Jean-Pierre
Jouyet (photo
ci-contre), le secrétaire d'État français aux Affaires européennes,
s'inquiète des réactions négatives suscitées, en Europe, par le
projet d'Union méditerranéenne lancé par Nicolas Sarkozy au
moment de son élection à la présidence de la République, en juin
2007. De fait, l'initiative française est mal vue à Berlin.
L'Allemagne craint qu'elle n'entre en concurrence avec d'autres
projets similaires de coopération entre l'UE et les pays du Sud,
dont le Maroc et l'Algérie. Par ailleurs, Angela Merkel refuse
que les pays du nord de l'Europe, ne possédant pas de côte
méditerranéenne, soient mis à l'écart.
Le secrétaire
d'État aux Affaires européennes a confié le 25 janvier au Figaro
que ce dossier constituait «une véritable pomme de discorde»
avec nos partenaires européens. Il redoute qu'elle ne perturbe
le déroulement de la présidence française de l'UE, qui commence
le 1er juillet. «Les Allemands sont très sensibles au principe
d'une concertation en amont, avant tout effet d'annonce. Or nous
avons tendance à faire des annonces le matin et vouloir les
réaliser le soir, explique Jean-Pierre Jouyet. Il ne faudrait
pas qu'on se mette à construire un projet à côté ou en dehors de
l'UE, ce qui constituerait un très grave point d'achoppement.
Nous devons veiller à ne prendre aucune décision stratégique
dans ce domaine sans que tous nos partenaires soient associés»,
ajoute-t-il.
Le projet d'Union
méditerranéenne porte notamment la signature d'Henri Guaino (photo
ci-après), le
conseiller spécial de Nicolas Sarkozy.
À
l'origine, Paris se déclarait prêt à refondre toutes les
initiatives politiques existantes sur le sujet, dans un grand
ensemble politique intitulé Union méditerranéenne : c'est-à-dire
le processus de Barcelone, lancé en 1995, et la politique de
voisinage, pilotée par la Commission européenne et visant à
construire un partenariat sur mesure entre l'UE et ses
principaux voisins, dont les pays méditerranéens. Aujourd'hui,
Jean-Pierre Jouyet exhorte l'Élysée à ne pas trop pousser les
feux, soulignant que le projet français devait être
«complémentaire» des politiques déjà existantes, voire s'appuyer
sur elles.
«Un choix
stratégique»
«Il s'agit de se
concentrer sur trois à cinq projets, pas plus» estime-t-il,
citant les transports ou l'énergie. Il écarte l'idée de
développer un projet de «civilisation» avec les pays
méditerranéens, comme l'idée fut évoquée.
«Le grand projet
de civilisation, il est européen. Si nous en voulons un autre,
il faut le dire. Si, à l'occasion de notre réunion qui sera
organisée sur la Méditerranée, les 13 et 14 juillet à Paris,
nous donnons l'impression à nos partenaires, notamment
allemands, de vouloir privilégier une union à côté d'une autre,
nous aurons beaucoup de mal à conserver la crédibilité de la
présidence française. Nous sommes placés devant un choix
stratégique : soit nous privilégions une présidence française
ambitieuse, assurant la nécessaire continuité des dossiers
européens, tout en donnant les impulsions nécessaires. Soit nous
considérons que l'Union méditerranéenne, en soi, est plus
importante que tout le reste. Mais à ce moment-là, nos
partenaires pourraient nous demander de choisir», avertit-il. |