|
16/04/2002 |
De qui est le texte dont je vous propose quelques extraits significatifs ?
"Stéréotype aussi tenace qu'infondé. Non que depuis deux cents ans ce que l'on a appelé "la gauche" n'ait pas contribué au progrès social. Mais sur deux siècles le mot "gauche" n'a cessé de changer de sens, et c'est Jules Ferry, homme classé à droite, qui a institué l'école républicaine laïque et gratuite, le général de Gaulle, contre lequel la gauche défilait en 1958 en criant "Le fascisme ne passera pas", qui a créé la Sécurité sociale et l'assurance-chômage, et le service public et l'État républicain doivent davantage à Michel Debré qu'à Guy Mollet ou à François Mitterrand. Pas plus qu'il ne suffit d'invoquer le nom du général de Gaulle pour incarner une certaine idée de la France, il ne suffit d'invoquer les grandes figures des luttes sociales pour incarner la justice, la solidarité ou la République ...
... Il nous faut sortir des schémas manichéens. L'État républicain a vocation à transcender les intérêts particuliers, non à les nier. A l'inverse, la concurrence ne résout pas tous les problèmes et l'entreprise privée n'a pas le monopole de la création de richesse. Le secteur public ne se contente pas de consommer des ressources, il contribue au bien-être, à la productivité globale du pays et à la compétitivité des entreprises. L'hôpital crée de la valeur ajoutée, l'école aussi. Il ne faut pas confondre la fin et les moyens : la compression des coûts, la réduction des effectifs, la privatisation, pour nécessaires qu'elles soient parfois, ne sont pas des fins en soi. Nous savons d'expérience que le rationnement budgétaire fondé sur une approche exclusivement comptable est la pire des méthodes parce qu'elle génère souvent plus de dysfonctionnements et de gaspillages qu'elle n'en supprime. Il faut chercher avant tout à accroître la productivité de la dépense, à améliorer l'efficacité des services publics à partir de critères qui ne peuvent pas être exclusivement financiers. On n'améliorera le fonctionnement du secteur public ni en le paupérisant ni en dévalorisant le travail des fonctionnaires. Quoi qu'on en dise, comparé à bien d'autres pays, nous avons tout lieu d'être fiers de notre État, de notre fonction publique, de nos entreprises publiques. Plus qu'ailleurs sans doute, pour des raisons à la fois géographiques et culturelles, ils sont nécessaires à l'égalité des territoires, à la cohésion, à l'unité de la nation ...
... La clé de voûte du pacte républicain, c'est bien sûr le principe d'égalité, c'est aussi la morale de l'effort, du mérite, de l'utilité sociale, l'autonomie et la dignité du citoyen forgées dans le travail ...
... Les principes qui doivent guider l'action sont l'évaluation, la récompense du mérite, la cohésion sociale, l'égalité devant le service public et devant la loi, l'égalité des chances ...
... C'est dans cet esprit qu'il faut s'opposer au repli du service public dans les zones rurales et les quartiers en difficulté...
... Lorsque l'État est pauvre, c'est la république qui est abaissée ...
... Lorsque l'égalité devant le service public n'est plus assurée, c'est la république qui se défait...".
De Jean-Pierre CHEVÈNEMENT ? Ce texte lui ressemble… mais il n'en est pas l'auteur.
Si je vous dis Henri GUAINO, vous conviendrez avec moi qu’il n’y a rien de surprenant pour peu que vous le connaissiez. Proche de Philippe Seguin, Henri GUAINO n’a jamais caché son gaullisme. Ancien commissaire général au plan, il est particulièrement bien placé pour apprécier et nous faire partager la conception très gaullienne de la planification à la française, cette « ardente obligation » initiée par le général de Gaulle.
Plus surprenant est le co-auteur (ou co-signataire) de ce texte. Nicolas Sarkosy est plus connu pour son approche libérale que pour son orthodoxie gaullienne. Faut-il l’en blâmer ? Non ! Il n’est jamais trop tard pour aller dans le bon sens.
Mais au fait ! Pourquoi le candidat Jacques Chirac n’a-t-il pas approuvé ce texte ?
Alain KERHERVE