Voici
quelques semaines, François Bayrou et Nicolas Dupont-Aignan ont
signé l'appel républicain de Marianne. Son objectif ? Rassembler
l'opposition sur la défense de quatre principes républicains :
la laïcité, la lutte contre les dérives monarchiques du régime,
l'indépendance de la presse et la poursuite de la politique
étrangère de la France. Ce dernier point rappelait l'attachement
des signataires «aux grandes options qui ont guidé, depuis
cinquante ans, au-delà des clivages partisans, une politique
étrangère digne, attachée à la défense du droit des peuples et
soucieuse de préserver l'indépendance nationale et de construire
une Europe propre à relever les défis du XXI° siècle.»
Une motion quasi-gaulliste
La logique voulait que Bayrou
et Dupont-Aignan votent la motion de censure déposée par les
socialistes à l'Assemblée nationale le 8 avril, d'autant que
celle-ci reprenait quasiment les termes de l'appel de Marianne,
étant rédigée dans des termes presque gaulliens, compatibles
avec la droite et le centre républicains : «Nous voulons
éclairer les Français sur la dangereuse rupture que sont en
train d'opérer le président et son gouvernement avec le
consensus national qui prévalait sur les principes
d'indépendance militaire et stratégique de notre pays.» (…)
« L'ouverture de négociations
sur le retour de la France dans le commandement intégré de
l'Otan, la compréhension affichée envers la funeste intervention
américaine en Irak, le discours prononcé par le chef de l'Etat
devant le Congrès américain ont posé les jalons d'un alignement
atlantiste global dont nous récusons la pertinence et
l'opportunité pour notre pays.» On a même entendu le très peu
gaulliste Noël Mamère tonner dans l'hémicycle : «On aurait
presque envie de dire : MM. Chirac et Villepin, revenez, ils
sont devenus fous!»
Un argumentaire peu
convaincant
Or Nicolas Dupont-Aignan a
voté cette motion tandis que François Bayrou s'abstenait. Un
vote inversement proportionnel au risque que comportait ce vote
: nul pour François Bayrou, que Nicolas Sarkozy continue de
considérer comme un ennemi prioritaire, et conséquent pour
Dupont-Aignan, qui appartient à la majorité. Le silence
assourdissant d'un Philippe de Villiers ou d'autres députés
supposés de sensibilité gaulliste, qui ont voté contre le motion
de censure, confirme d'ailleurs l'audace de NDA. Par contraste,
celle-ci souligne l'erreur de François Bayrou, qui prend, lui,
le risque de n'être compris ni de ses électeurs, aujourd'hui
majoritairement opposants au régime, ni de ses militants (voir
l'article d'Anna Borrel). Certes, le leader du MoDem a fourni
une explication à sa décision en regrettant que les socialistes
aient «mélangé» deux sujets, l'OTAN et l'Afghanistan qui, dans
son esprit, ne devaient pas l'être, affirmant même qu'il aurait
voté la motion si elle n'avait porté que sur l'OTAN. L'argument
ne convainc guère à la lecture de la motion de censure qui
dénonce globalement le risque d'une dérive atlantiste du régime
: la question de l'Afghanistan y est presque secondaire.
Article paru dans
marianne2.fr |