Communiqué du 03 mai 2005
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Ratification constitutionnelle : Les Pays-Bas, l'autre mouton noir.

 

 

LA HAYE (AFP) - Les Pays-Bas ont infligé un nouveau coup, peut-être fatal, à la Constitution européenne, trois jours après le non français, en la rejetant massivement mercredi lors d'un référendum où le non l'a emporté avec 61,6% des voix, selon les résultats définitifs non officiels.

Ce rejet par un deuxième pays fondateur de l'Union européenne après la France ne doit pas empêcher "le processus de ratification de continuer", a déclaré le président en exercice de l'UE, le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, tout en se disant "inquiet" quant à l'issue du référendum prévu le 10 juillet prochain dans son pays.

Le Premier ministre néerlandais, Jan Peter Balkenende, s'est dit "très déçu" mais a promis de respecter la volonté de ses concitoyens d'autant que le taux de participation s'est élevé à 62,8%, selon ces résultats collationnés par l'agence de presse ANP avec les chiffres des bureaux de vote.

Les résultats officiels ne devaient être publiés que lundi. Le taux de participation est donc de près de 24 points supérieur à celui des élections européennes de juin 2004, attestant de la mobilisation des quelque 11,6 millions de Néerlandais. Les principaux partis avaient dit qu'ils tiendraient compte de ce référendum consultatif si la participation dépassait 30%. Un débat aura lieu jeudi au Parlement à La Haye en présence du Premier ministre Balkenende.

"Le peuple néerlandais a donné hier le coup de grâce à la Constitution européenne", estimait le quotidien Algemeen Dagblad (centre droit) dans son édition à paraître jeudi. Le chrétien centriste Trouw évoquait "une gifle pour le gouvernement et pour la grande majorité des députés", et le populaire De Telegraaf, premier tirage du pays, la "punition sévère imposée à l'ordre établi.

"C'est un signal clair et que nous ne pouvons pas nier", a admis M. Balkenende. Comme lui, plusieurs leaders européens semblaient circonspects quant à la suite de la construction européenne. Pour le ministre des Affaires Etrangères britannique Jack Straw, ce vote pose "de sérieuses questions" sur la direction que doit prendre l'UE. Le président français Jacques Chirac, dont les compatriotes ont voté non à 54,67%, a parlé de "fortes préoccupations" exprimée par les électeurs sur le projet européen.

Mais le chancelier allemand Gerhard Schröder a en revanche estimé que "le processus de ratification doit continuer". A New York, l'euro est tombé sous le seuil de 1,22 dollar, son plus bas niveau depuis plus de huit mois.

Aux Pays-Bas, dans le camp du non, l'heure était à l'euphorie. A Amsterdam, de 200 à 300 militants du Parti socialiste (SP), une petite formation très à gauche, ont sauté de joie, s'étreignant et criant leur satisfaction à l'annonce des résultats. "Nous nous réjouissons que les Néerlandais n'aient pas plié devant l'épouvantail brandi par le gouvernement", a dit pour sa part Mat Herben, député de la Liste Pim Fortuyn (LPF, populiste, opposition), l'un des plus fervents militants du non. Le camp hétéroclite du non rassemble les protestants les plus rigoristes, la LPF, le Parti socialiste, et le député d'extrême droite Geert Wilders, soit seulement 22 des 150 sièges du parlement.

Du côté des partisans du oui, l'heure était à l'autocritique et aux moyens de combler le "gouffre" entre la population et la classe politique, majoritairement favorable à la Constitution. "Le non est un signal aux politiques pour dire: +arrêtez-vous et écoutez-nous+", a déclaré Maurice de Hond, directeur d'un des principaux instituts de sondage des Pays-Bas. Selon les sondages, les Néerlandais redoutent une dissolution de leur petit pays dans l'Europe élargie, et une intervention de Bruxelles sur des dossiers comme la politique libérale en matière de drogues douces, le mariage ouvert aux homosexuels ou l'euthanasie autorisée sous condition.

Ils voient une preuve de la malhonnêteté des politiques dans l'aveu de l'ancien directeur de la Banque centrale néerlandaise selon lequel le florin avait été sous évalué par rapport au deutschemark lors du passage à l'euro. Parmi les autres raisons du non figurent la crainte de l'étranger et une possible adhésion de la Turquie. "J'ai voté non car je n'ai pas confiance dans le gouvernement", déclarait un retraité de 65 ans dans un bureau de vote du centre d'Amsterdam. Il se disait aussi mécontent de l'élargissement de l'UE à 25 pays, refusant notamment "les Polonais, à 98% très catholiques et superstitieux".

Le non ne fera toutefois pas tomber le gouvernement de La Haye, à la différence de ce qui s'est passé à Paris mardi. En effet, quelque 80% des élus soutenaient le oui, et c'est le parlement, contre l'avis du gouvernement, qui était à l'origine du référendum. Quelque 58% des Néerlandais estiment que ce non massif ne doit pas entraîner de conséquences pour le gouvernement, selon un sondage réalisé mercredi soir. Ce référendum était le premier à l'échelle nationale en quelque 200 ans d'histoire moderne du royaume.

 
  • Le «non» néerlandais «signe l'enterrement définitif de la Constitution européenne», selon les souverainistes de l'UMP

Les 14 parlementaires UMP du cercle «les Républicains» ont estimé mercredi soir que la victoire du «non» aux Pays-Bas «signe l'enterrement définitif de la Constitution européenne».

«C'est une nouvelle preuve, s'il en était besoin, de la nocivité de ce traité, dont l'abandon est une bonne nouvelle pour les peuples d'Europe et l'avenir du projet européen», jugent dans un communiqué ces 14 parlementaires, dont le chef de file est Nicolas Dupont-Aignan.

Ces partisans du «non» mettent en garde contre «la tentation de ressusciter la Constitution par morceaux», qui «serait l'expression d'un profond mépris pour la démocratie». (Objectif-France a attiré l'attention sur ce point dans son dernier édito)

«Il est grand temps de réorienter radicalement la politique économique de l'Union européenne en revoyant sa politique monétaire et en rétablissant la préférence communautaire du traité de Rome», concluent ces députés et sénateurs, qui ont demandé audience à Jacques Chirac et à Dominique de Villepin.