La légitimité présidentielle

06/02/2002

 

L’élection présidentielle se profile à l’horizon, et comme de coutume, le monde politique est en ébullition ; rien de plus normal. L’avenir de la France se joue, pour une part importante, à cette occasion.

De là à penser que tous nos compatriotes s’y intéressent, il y a un fossé que je ne franchirai pas. Nous pouvons, nous devons devrais-je dire, le déplorer. Mais d’où vient ce divorce entre les Français et ceux qui sont censés les représenter ?

Il s’agit, à l’évidence, du manque de légitimité de la fonction présidentielle telle que nous la vivons depuis 1986 sous ce régime épisodique de cohabitation.

On peut concevoir deux sortes de légitimité.

  • Celle du Général de Gaulle, évènementielle, évidente à partir du moment où, incarnant la France combattante, il a conduit notre pays à la table des vainqueurs. Puis, en 1958, alors que la France s’enfonçait une nouvelle fois dans le chaos, celui-là algérien, c’est à lui que le peuple lance un S.O.S : «  patrie en danger !».
  • Celle octroyée par le suffrage universel, par délégation du peuple souverain.

La 4ème république, purement parlementaire, prisonnière des partis politiques, n’a jamais réussi à dégager une légitimité nationale. La somme des légitimités locales, celle des députés, ne peut, quelle que soit la valeur de ces élus, « accoucher » d’une légitimité globale.

C’est à partir de ce constat que le Général de Gaulle, saisissant l’opportunité des attentats dirigés contre lui, fait ratifier par référendum en 1962, malgré l’opposition de la classe politique, l’élection du Président de la république au suffrage universel. La légitimité nationale peut désormais s’acquérir par élection directe et se conforter dans le temps, si besoin est, par la pratique du référendum.

Mais, pour que cette élection présidentielle se déroule normalement et aboutisse à cette légitimité nationale, il est indispensable qu’elle soit le produit d’une alchimie de plusieurs facteurs appréciés, même différemment, par les uns ou les autres.

Le jugement de l’action passée.

S’il n’est pas toujours possible, notamment pour des candidats inconnus, ce qui ne veut pas dire sans valeur, il est en revanche fondamental pour ceux d’entre eux qui détiennent un passé politique.

Jacques Chirac a tout fait : Député, Ministre, Maire de Paris, Premier Ministre, Président de parti politique, Président de la République. Son passé est suffisamment conséquent pour porter un jugement.

C’est également le cas pour Lionel Jospin, notamment en appréciant ses cinq dernières années passées plus à subir la loi de la rue et des féodalités de toutes sortes qu’à gouverner réellement.

Les autres candidats, Chevènement, Bayrou, Madelin, Le Pen, Hue … et Charles Pasqua, ont suffisamment participé à la vie politique ces dernières années pour nous fournir quelques repères satisfaisants.

Le projet pour la France de demain.

Que cela soit bien clair ! Il ne s’agit pas de confondre catalogues de promesses permettant d’appâter les électeurs en les brossant dans le sens du poil et projet permettant aux candidats de tracer les orientations essentielles conduisant à une France telle qu’ils peuvent l’entrevoir et la souhaiter à moyen terme.

Il convient de bien faire la différence entre le catalogue de VPC (Vote par catalogue) et le projet de société, seul véritable enjeu de cette consultation.

La personnalité du candidat

Il est inutile de nier que le facteur affectif représente, dans cette élection nationale, une part importante non dénuée de bon sens, notamment lorsque les projets sont si proches. Mais dans ce cas, n’est-il pas logique de s’interroger : « pourquoi sont-ils plusieurs candidats à proposer les mêmes orientations ? »

  • Pour conclure, il faut bien comprendre que l’élection présidentielle est bien la rencontre d’une conscience et d’une confiance ; une conscience politique plus ou moins affirmée et exprimée autour d’un projet global d’avenir, une confiance en celui qui l’exprime et sera capable d’en assurer la mise en œuvre.

Alain KERHERVE