11/10/2002


LA FRANCE EN HAUT

 

Objectif-France publie dans sa rubrique " coup de coeur " les articles qui ont retenu particulièrement l'attention de la rédaction et dont elle approuve le contenu.

 

 

Nicolas Dupont-Aignan

Député UMP

Président du club "Debout la République"

 

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Contribution républicaine et gaulliste

Union pour la Majorité Présidentielle

                                                                       

L’ampleur de la victoire à l’élection présidentielle puis aux élections législatives ne doit pas faire oublier que la France traverse une crise politique aiguë : alors que 40% des Français se résignent à l’abstention, un votant sur trois s’abandonne aux extrêmes.

Ce profond désarroi touche particulièrement les couches les plus fragiles de la société (les ouvriers, les chômeurs, les jeunes), conduisant à la situation paradoxale où ce sont ceux qui ont le plus besoin de la politique qui s’en détournent. Mais peut-on vraiment les en blâmer dès lors que les gouvernements successifs se dédouanaient en répétant qu’ils n’étaient plus en mesure d’apporter des solutions aux problèmes quotidiens des Français et de peser sur le destin de la France ? Pourtant, les Français n’ont pas varié dans l’expression de leur volonté puisque, depuis le début des années 1980, ils ont toujours sanctionné par leur vote les gouvernements sortants, qui appliquaient la même politique, " la seule possible " nous disait-on.

Le décalage entre les aspirations de la population et ses représentants a atteint son paroxysme avec le gouvernement de la gauche plurielle, qui a naïvement baissé les bras devant la montée de l’insécurité, privilégié la baisse autoritaire du temps de travail sur la revalorisation concertée de ses conditions et de la rémunération et dilapidé les fruits de la croissance au lieu d’investir pour l’avenir. En refusant la paralysie d’une nouvelle cohabitation, les Français ont clairement indiqué à la classe politique que leur patience avait des limites et qu’il était temps que les gouvernements entendent enfin leur exigence de changement.

Depuis le coup de tonnerre du 21 avril, on n’a jamais autant parlé de la République. Mais, comme le disait le général de Gaulle en 1946, " si la République est sauvée, il reste à la rebâtir ". C’est en se nourrissant des valeurs de la République, en donnant un sens concret à sa devise -Liberté, Égalité, Fraternité-, que la France pourra se montrer à la hauteur de son ambition, à la fois pour son peuple et pour l’humanité tout entière.

 

 Liberté

Depuis que les libertés constituent un thème à la mode, on assiste au contraire à un rétrécissement de la liberté. En effet, la violence croissante qui mine au quotidien la société française ne permet plus à tous les Français de jouir de la liberté dans son sens le plus élémentaire. Que signifie la liberté pour les habitants des cités qui n’osent plus sortir de chez eux, de peur d’être couverts d’insultes ou d’être rackettés ? Contre la loi de la jungle, la loi républicaine est la garantie de la liberté de chacun. Encore faut-il la faire respecter. La violence commence toujours là où finit la loi. C’est aussi ce que montre tristement la violence routière, où les petites infractions, encouragées par une trop grande tolérance des autorités, aboutissent à de grandes catastrophes. Que signifie la liberté pour des familles décimées par des chauffards irresponsables et égoïstes ? Il est temps de tourner définitivement le dos à l’angélisme et à l’impunité pour mener une guerre sans relâche contre ceux qui refusent de se situer dans la légalité républicaine. Définir des moyens et une organisation mieux adaptés, garantir l’application et l’unité de la loi pénale, adapter la loi aux nouvelles formes de criminalité, autant d’orientations pour rétablir l’ordre républicain, tâche à laquelle s’est attelé avec volontarisme le nouveau gouvernement.

Rétablir l’autorité de la loi est le préalable nécessaire à la mise en oeuvre des principes fermes et généreux de la République Française. Cela vaut pour les citoyens français qui aspirent naturellement à placer leur existence et leur famille sous la protection des institutions républicaines. Mais cela vaut également pour les étrangers que la France a décidé d’accueillir sur son sol et qui ont accepté de vivre selon les lois de leur patrie d’élection. Or, il est injuste pour ces travailleurs régulièrement installés sur notre territoire avec leurs familles, et qui ont fait le choix difficile et exigeant de l’intégration dans des conditions sociales précaires et dans un environnement urbain déprimé, de mesurer l’indifférence qu’ils suscitent aujourd’hui au regard du tintamarre orchestré autour des sans-papiers. En remuant ciel et terre afin de donner sans contrepartie des avantages à ceux qui sont entrés clandestinement, inaugurant ainsi leur séjour en France par la violation de ses lois, certains cénacles parisiens contribuent dangereusement à saborder la tradition d’ouverture et d’accueil de notre pays. Là aussi, il importe d’appliquer la loi : il faut donc oser reconduire à la frontière les immigrés clandestins. L’immigration doit être maîtrisée dans l’intérêt même des étrangers qui sont régulièrement installés en France.

La liberté des individus résulte aussi de l’indépendance acquise par le travail. C’est pourquoi la lutte contre le chômage doit être la priorité absolue de la politique économique. Le sentiment d’euphorie passager et l’autosatisfaction affichée par le gouvernement de la gauche plurielle à l’occasion de la diminution, hélas conjoncturelle, du nombre de demandeurs d’emploi observée entre 1998 et 2001 a donné à ceux qui n’en bénéficiaient pas, et qui s’enfonçaient pour certains dans une longue période d’inactivité, le sentiment que le chômage n’était plus qu’un problème secondaire dans l’esprit des gouvernants. Cet aveuglement à l’égard de situations individuelles et familiales de plus en plus tragiques n’est sans doute pas étranger au score enregistré par l’extrême-droite au soir du 21 avril.

Disposant d’une main-d’œuvre qualifiée et d’un outil industriel performant, regorgeant d’énergies et d’idées, la France a les moyens de retrouver rapidement le chemin de la croissance et de créer des emplois.

Il est urgent de rompre avec l’idéologie de la fin du travail qui a été inoculée dans la société au cours de la décennie précédente et dont les 35 heures constituent une funeste application. Pénalisant les PME au profit des multinationales, les lois Aubry resteront dans l’histoire comme le marchepied paradoxal du blocage des salaires et de la flexibilité. Dans un contexte de stagnation des bas salaires, il est certes nécessaire d’assouplir les accords en vigueur afin de laisser à ceux qui le souhaitent la possibilité de travailler plus pour gagner davantage. Mais il faut aller plus loin et avoir le courage d’appliquer un moratoire sur les 35 heures dans les PME afin que, dans la concertation, salariés et employeurs puissent décider ensemble d’un arbitrage équitable entre augmentation des rémunérations et diminution du temps de travail. Les marges de manœuvre financières existent : les 20 milliards d’euros dépensés chaque année pour financer les 35 heures doivent être employés à stimuler la croissance au lieu de subventionner la paralysie de notre tissu industriel. La politique sociale dans notre pays ne doit pas se borner à osciller entre une gauche qui dilapide les fruits de la croissance et une droite qui se contente de digérer des conquêtes sociales mal préparées. Aussi, la nouvelle majorité doit-elle innover en proposant aux Français un nouveau contrat économique et social susceptible de mobiliser l’ensemble de la société autour d’objectifs clairement définis et répondant à l’intérêt général.

 

Égalité

Avec sa sécurité sociale, son système de retraites par répartition, ses services publics, son école gratuite, la France réfute le capitalisme intégral. L’exception française repose sur le pari de concilier l’économie de marché et l’égalité parce que le citoyen, l’homme, aspire tout autant à la prospérité et au confort qu’à la solidarité et à la protection. Le nouveau contrat économique et social que nous proposons s’inscrit résolument dans cette perspective.

Dans le domaine de l’économie, nous constatons après les Trente Glorieuses les dégâts causés par les Trente Piteuses. Parce que rien n’est possible si l’économie est grippée, il est primordial de créer les conditions d’un rapide retour à la croissance. La baisse des charges sur les bas salaires constitue un moyen efficace de favoriser l’embauche des moins qualifiés de même qu’un allègement significatif des droits de succession permettrait de faciliter la transmission des entreprises. La création d’entreprises doit être encouragée, en simplifiant notamment les procédures et en permettant aux nouveaux entrepreneurs de bénéficier provisoirement de l’assurance-chômage. Il convient par ailleurs de développer le capital-risque pour permettre aux secteurs porteurs et innovants de trouver les fonds nécessaires à leur développement. De telles mesures sont de nature à enrayer la dramatique fuite des cerveaux et des énergies dont souffre la France.

Mais les engagements pris par l’État pour tendre le ressort économique doivent avoir naturellement pour contrepartie un effort social de la part du secteur productif. De ce point de vue, il faut se féliciter de la récente décision d’harmonisation des SMIC. Pour créer un climat de confiance susceptible de remobiliser l’ensemble des acteurs autour du redressement de notre pays, il faut notamment que les droits des actionnaires minoritaires soient respectés et que les entreprises s’engagent à investir dans les domaines stratégiques que sont la formation et la recherche. Dans le même esprit, l’heure est venue de poursuivre l’action en faveur de la participation entamée par le général de Gaulle pour humaniser l’économie : " Dès lors que des gens se mettent ensemble pour une œuvre économique commune, en apportant soit les capitaux nécessaires, soit le travail, il s’agit que tous forment ensemble une société où tous aient intérêt à son rendement et à son bon fonctionnement, et un intérêt direct. " Cette grande réforme ne doit cependant pas se cantonner au secteur privé. En effet, afin de sortir de la logique dangereuse qui pousse à privatiser les fleurons des entreprises d’État pour financer des dépenses de fonctionnement, la participation pourrait redonner du souffle à un secteur public sclérosé en réunissant ses salariés et ses usagers autour d’une gestion mutualiste, qui a fait ses preuves dans d’autres secteurs de l’économie et qui donnerait à l’État les moyens d’une modernisation en profondeur de ses entreprises. Car, contrairement à ce que prétendent les idéologues de l’ultralibéralisme, l’état des affaires est l’affaire de l’État. En effet, alors que le capitalisme boursier connaît un krach auquel on refuse de donner son nom, seul l’État est en mesure d’agir à l’encontre des cycles économiques et de s’affranchir de la tyrannie du court-terme, qui pénalise les sociétés cotées pour procéder aux investissements que commandent l’intérêt général et une vision prospective des métiers d’avenir. Devant le marasme de l’économie virtuelle, la politique publique doit prioritairement conforter les entreprises de l’économie réelle. La France doit pouvoir s’appuyer sur un État moderne, impartial et libéré du poids de l’idéologie, capable d’être un moteur et non plus un boulet pour la société. Le nouveau contrat économique et social contribue ainsi à dessiner les contours d’un libéralisme apaisé où le développement est au service de l’égalité.

L’égalité républicaine n’est qu’un slogan si on ne donne pas à l’école, aujourd’hui engourdie, les moyens de la mettre en œuvre. En effet, l’égalité des chances est menacée par le lent mais régulier travail de sape dont a souffert notre système d’éducation sous l’effet conjugué d’un corporatisme parasitaire et d’une culture de la permissivité léguée par mai 68. Le pédagogisme naïf et le conservatisme syndical sont les deux principales causes de l’échec scolaire qui atteint des niveaux inédits alors que les crédits consacrés à l’éducation n’ont jamais été aussi abondants. Il est intolérable que des enfants puissent quitter le système scolaire sans même avoir appris à lire correctement. La France dispose d’un outil éducatif exceptionnel que beaucoup de pays lui envient. Encore faut-il qu’elle puisse en utiliser au mieux les ressources : la gestion des ressources humaines au sein de l’Éducation nationale, qui suppose notamment une modulation des rémunérations en fonction des affectations, doit cesser d’être un tabou.

Contre la démagogie ambiante, il faut faire de l’école républicaine le lieu emblématique où chaque jeune trouvera le goût de l’effort, le sens du travail, la joie de comprendre et la fierté de s’élever.

Afin que chacun se sente associé au projet éducatif, il importe donc de conforter les professeurs qui doivent retrouver une entière autorité sur les classes en échange d’une plus grande responsabilisation dans la lutte contre l’échec scolaire. L’école doit assurer la promotion de tous tout en sélectionnant les meilleurs.

L’égalité de tous devant la loi, principe fondateur de la République, ne doit tolérer aucune exception. Ces dernières années, les responsables politiques ont trop souvent cédé à la facilité et à l’air du temps en adoptant des mesures clientélistes destinées à réprimer les discriminations réelles ou supposées à l’encontre de telle ou telle catégorie. Ceux-là mêmes qui se félicitent de bafouer la loi lorsqu’il s’agit de cannabis ou de rave-parties n’ont de cesse de réclamer des lois répressives spécifiques, au gré des modes et des tendances. Cette dérive paranoïaque de notre droit pénal est dangereuse et inutile : au lieu de voter dans la précipitation des textes de circonstance d’inspiration communautariste, il convient plutôt de veiller à l’application scrupuleuse des lois existantes qui protègent les citoyens, quels qu’ils soient, des pratiques discriminatoires de toutes sortes.

Pour appliquer le principe d’égalité et se montrer à la hauteur des défis de notre temps, l’État ne fera pas l’économie d’une profonde réforme de ses structures et de ses règles de fonctionnement. De la même façon que de nombreux cadres de la fonction publique rejoignent chaque année le secteur privé, l’État doit pouvoir attirer des compétences et des profils d’expérience issus de l’entreprise pour les mettre au service de la collectivité dans les administrations centrales, les services territoriaux ou encore la diplomatie. Il ne doit pas cependant demeurer à l’écart du progrès et de l’effort de productivité demandé à la nation ; c’est pourquoi la réduction des coûts de fonctionnement de l’administration doit être recherchée, grâce notamment aux nouvelles technologies. Garant de l’intérêt général, l’État doit sauver la décentralisation, à la fois incomplète et menacée tant par le séparatisme que prônent des groupes minoritaires n’hésitant pas à recourir à l’intimidation et à la violence que par le féodalisme de certains élus locaux. Ciment de l’égalité entre les citoyens, l’unité de la République est un principe fondamental qui ne doit pas être remis en cause. Il faut donc en finir avec les expérimentations dangereuses initiées par le gouvernement Jospin. A l’occasion d’un renforcement des compétences confiées aux collectivités locales, le mode d’administration de notre pays doit être simplifié pour être mieux compris des citoyens. Cela passe sans doute par la suppression d’un échelon local et par une clarification des compétences entre les collectivités territoriales, chargées d’alimenter le foisonnement des initiatives économiques, sociales et culturelles, et l’État, garant de la cohésion nationale, car une décentralisation réussie suppose qu’il y ait un véritable centre. Enfin, le contrôle des collectivités locales mérite d’être dirigé dans le cadre de la lutte contre la corruption. Nous voulons étendre le nouveau contrat économique et social à l’ensemble des territoires afin que s’exerce la solidarité nationale et que le développement n’en oublie aucun.

 

Fraternité

Valeur fondamentale de la République, la fraternité est non seulement le ciment de la cohésion nationale mais aussi le principal message que la France a vocation à délivrer aux autres nations.

En France, la fraternité doit relever le défi posé par l’existence de plus de quatre millions de personnes vivant aujourd’hui sous le seuil de pauvreté. Leur désespoir constitue un réservoir de frustrations et de colères pour tous les démagogues. La France est ainsi faite que le malheur des uns y gâche le bonheur des autres. C’est pourquoi il est essentiel de passer de l’assistanat à la solidarité en substituant notamment des activités d’utilité collective au simple versement d’une allocation qui, comme l’expérience le montre, fait souvent fi de son objectif d’insertion. Tendre la main aux oubliés de la croissance, assurer la solidarité entre les générations en assurant le maintien de la retraite par répartition dont une politique familiale vigoureuse constitue la meilleure garantie, doter notre pays des équipements et des fonds nécessaires à la conduite d’un combat victorieux contre le cancer constituent autant d’objectifs concrets pour vivifier le sentiment national et faire en sorte que les Français soit fiers de leur pays.

La France doit renouer avec de grands défis pour rassembler son peuple autour d’une vision d’avenir. La protection de l’environnement passionne les jeunes autant qu’elle inquiète leurs aînés. Pays de terroirs doté d’une rare diversité géographique, notre pays doit se montrer exemplaire dans la défense de la nature afin que nous puissions léguer à nos enfants une France verte et équilibrée où il fait bon vivre. Forte d’une longue tradition en matière de création et de protection des arts, la France doit poursuivre son combat afin de tenir la culture et les idées à l’écart de l’uniformisation marchande car le citoyen ne doit pas être réduit au rang de consommateur.

N’en déplaise à ceux qui ne veulent retenir de notre passé que l’épisode de Vichy, la France incarne aux yeux du monde un certain humanisme auquel il est grand temps de donner un nouveau souffle. Réconciliée avec son histoire et avec son peuple, la France pourra à nouveau montrer l’exemple. La France est surtout riche de sa personnalité, qu’elle a su forger au cours des siècles au croisement de plusieurs civilisations admirables, et ce n’est pas en la niant mais au contraire en l’affirmant qu’elle nourrira de façon positive les aventures collectives auxquelles elle participe, et notamment la construction européenne.

Avec la chute du mur de Berlin, l’Europe et le monde ont changé d’époque. Le réveil des nations soumises au joug soviétique appelle davantage à la coopération qu’à l’uniformisation dont, mieux que personne, les peuples d’Europe centrale ont pu constater les méfaits. Il est temps de réorienter la construction communautaire en fonction des intérêts communs des nations de l’Union européenne et de limiter ses progrès aux domaines pour lesquels elle peut avantageusement se substituer aux États : grands travaux, aménagement du territoire, grands projets industriels, protection du marché intérieur européen.

Aujourd’hui dans l’impasse où l’a conduite une politique d’intégration qui l’amène à s’occuper de tous les sujets, souvent au mépris de la liberté et de la diversité des peuples, l’Europe sera sauvée par ses nations. C’est pourquoi la France ne doit plus souffrir que l’Europe avance par oukases -sur la langue, les services publics ou encore le budget- ni ne doit plus hésiter à prendre l’initiative d’une explication courtoise mais ferme avec ses partenaires en appliquant, si nécessaire, la politique de la chaise vide pour que l’Europe ne se construise pas contre les peuples qui lui donnent corps. L’Europe ne peut ainsi échapper plus longtemps au contrôle des citoyens, ce qui suppose de renforcer les pouvoirs des parlements nationaux et de soumettre les traités relatifs aux institutions au referendum populaire. L’Europe ne doit pas être une camisole de force mais un tremplin. Aussi la politique monétaire européenne doit-elle avoir pour objectif prioritaire la croissance et l’emploi, qui seront inscrits à ce titre dans les statuts de la Banque centrale européenne afin qu’elle puisse être au service de l’économie, comme la Réserve fédérale aux États- Unis. 

On essaye depuis longtemps de nous faire croire que la France est vouée à jouer en seconde division, qu’elle n’est qu’une puissance moyenne. Au contraire, à l’heure où le fanatisme menace la stabilité de nombreux pays, où la guerre couve entre deux puissances atomiques et où l’Amérique Latine sombre dans la misère, nous croyons sincèrement que la France doit affirmer sa volonté de pacifier les relations internationales et de poursuivre sa politique généreuse en faveur du Tiers-Monde, en développant de façon plus vigoureuse les relais de la francophonie et en soutenant partout les peuples opprimés et les nations résolument engagées dans un processus démocratique, en faveur desquelles il ne faut pas craindre de recourir à la suppression de la dette. L’ambition du gouvernement ne doit pas se limiter à redonner l’espoir à la France d’en bas mais aussi à tous ceux qui, tenus à l’écart du progrès et de la prospérité, constituent l’humanité d’en bas comme l’a justement rappelé avec solennité le président de la République au récent sommet de Johannesburg.

L’histoire de la France est singulière et magnifique, non qu’elle soit glorieuse de bout en bout mais parce qu’elle est l’expression d’un modèle de civilisation fondé sur la liberté des nations et la résistance aux hégémonies. La France ferait preuve de réalisme en restant plus souvent fidèle à son idéalisme et en affirmant avec davantage de force les valeurs sur lesquelles elle s’est construite.

 

* * *

Liberté, égalité, fraternité. La devise de la France porte en elle ses ambitions. Pourtant, depuis une vingtaine d’années, la France se cherche. Les rapports, études et autres livres blancs se sont accumulés dans les officines sans pour autant que leurs constats, souvent justes et partagés par la majorité de nos concitoyens, ne se traduisent pas dans l’action. La République demeure une idée abstraite si elle ne se nourrit pas d’une démocratie forte.

Pour enfin faire vivre la devise de notre République, l’Etat ne peut en effet agir seul, sans s’appuyer sur l’énergie et l’imagination de la nation. A l’heure où les corps intermédiaires voient leur crédibilité remise en cause, que ce soit les médias dont l’indépendance est contestée, les grands patrons éclaboussés par les récents scandales financiers ou encore les partis politiques et les syndicats qui ne représentent plus guère qu’eux-mêmes, il s’agit d’établir un lien direct entre les centres de décision et la base. La France doit faire le pari de la démocratie pour rendre possibles les changements que les oligarchies et les corporatismes refusent afin de maintenir leurs privilèges.

Le Parlement, cœur battant de la démocratie, doit voir étendues ses prérogatives afin de redevenir l’écrin de la souveraineté et le lieu de débat respectueux qui sied à la représentation nationale. On doit enfin redonner la parole aux Français non pas à travers les sondages effectués à tort, et, à travers sur tout et n’importe quoi, mais en les consultant plus souvent par referendum sur les sujets qui engagent véritablement leur avenir après leur en avoir expliqué les véritables enjeux.

Il faudra bien sûr de l’audace à ce gouvernement pour mener à bien les chantiers auxquels les gaullistes et les républicains de la majorité comptent prendre toute leur part. Mais, dans une situation aussi critique que celle que nous connaissons aujourd’hui, la voie la plus risquée est sans doute celle qui conduit à ne prendre aucun risque.

C’est en s’enracinant dans les valeurs de la République et en leur donnant la traduction vivante et concrète du gaullisme que la France retrouvera sa vraie place : en haut !