Communiqué du 28 février 2007

 

Sarkozy et l'Atlantisme

 
  •        Par Laurent de Boissieu, La Croix 28/02/2007
                                                                               

Temps de parole radio : encore trop de Ségo-Sarko

 

Nicolas Sarkozy est bien décidé à ne pas fuir les sujets qui fâchent : il tient aujourd’hui, à Paris, une conférence de presse sur la politique internationale.

Si ce sujet ne se réduit pas à la question des relations avec les États-Unis, cette dernière y occupe une place importante. Or la question de la relation transatlantique est une de celles qui font débat au sein de son propre parti : elle a été mise en avant aussi bien par les chiraquiens, avant le ralliement de Michèle Alliot-Marie à Nicolas Sarkozy, que par Nicolas Dupont-Aignan, candidat à l’élection présidentielle et démissionnaire de l’UMP. La gauche en fait également un de ses chevaux de bataille contre « Sarkozy l’Américain ».

Concrètement, c’est la guerre américaine en Irak qui a cristallisé les oppositions. Pourtant, Nicolas Sarkozy n’a jamais publiquement soutenu l’idée d’une intervention hors du cadre de l’ONU. À l’époque numéro deux du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, il expliquait au contraire, en janvier 2003, que « la décision d’un conflit ne peut être qu’une décision collective, prise après un débat au Conseil de sécurité de l’ONU » : « Les Américains n’ont pas à décider seuls, sans tenir compte de l’avis d’autres nations, du fait de savoir s’il doit ou non y avoir paix ou guerre. » Cette déclaration ne préjuge toutefois pas de ce qu’aurait été sa position au Conseil de sécurité de l’ONU.

Ce qui est certain, en revanche, c’est que le candidat de l’UMP a postérieurement remis en cause celle de Jacques Chirac. « La menace de l’utilisation de notre droit de veto était inutile », a-t-il affirmé dans le contexte de son déplacement aux États-Unis, en septembre 2006. Lors de ce voyage, le numéro deux du gouvernement a, en outre, critiqué le discours prononcé par Dominique de Villepin, le 14 février 2003, à l’ONU, en dénonçant « l’arrogance française », les « mises en scène » et la « grandiloquence stérile ». Estimant par ailleurs, devant un auditoire américain, que « la France n’est pas exempte de reproches » car « il n’est pas convenable de chercher à mettre ses alliés dans l’embarras, ou de donner l’impression de se réjouir de leurs difficultés ».

Le 14 janvier dernier, lors du congrès de l’UMP, Nicolas Sarkozy a, semble-t-il, commencé à rectifier le tir en rendant « hommage à Jacques Chirac, qui a fait honneur à la France quand il s’est opposé à la guerre en Irak, qui était une faute ». Ce qui ne l’a pas empêché de recevoir ensuite, pour la présidentielle, le soutien d’intellectuels de gauche qui ont défendu la guerre en Irak et qui siègent aujourd’hui au comité éditorial de la revue Le Meilleur des mondes, comme Pascal Bruckner, André Glucksmann ou Marc Weitzmann.

Enfin, le candidat de l’UMP a implicitement brisé le tabou gaulliste du retour de la France au sein du commandement intégré de l’Otan. « La France, qui a quitté les structures intégrées de l’Otan en 1966, n’en reste pas moins un membre très actif et l’un des principaux contributeurs opérationnels », explique-t-il dans le numéro de janvier-février de la revue Défense de l’IHEDN.

Concluant que la France « devra demain réduire l’écart entre son discours et la réalité de la situation ». Reste à savoir si Nicolas Sarkozy, qui a déjà arrondi les angles de sa « rupture » dans le domaine économique et social, fera ou non aujourd’hui de même en ce qui concerne la politique internationale.

Laurent de Boissieu