Communiqué du 26 février 2007

 

Les partis politiques reprennent le pouvoir

 
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Ils détiennent la clef des candidatures à la présidentielle.

La IVème république prend sa revanche.

Le parti charnière revit de ses cendres.

Et si les Français envoyaient tout balader ?

 

 

 

Temps de parole radio : encore trop de Ségo-Sarko

Par Nicolas Domenach, directeur adjoint de la rédaction de Marianne.

 

 

Pour un peu on aurait cru hier que José Bové allait démonter le Conseil Constitutionnel. Il avait la moustache Mac Do, le candidat à la candidature altermondialiste, en rage contre ce système « injuste et anti-démocratique » qui veut que, pour être en mesure de se présenter à l'élection présidentielle, le prétendant doive fournir 500 signatures d'élus venant de plus de 30 départements. Signatures que le Conseil Constitutionnel rendra publiques, perspective qui a réduit singulièrement le nombre des élites volontaires.
C'était d'ailleurs le but de la manœuvre : faire en sorte que les 47 000 députés, sénateurs et maires n'accordent plus facilement leur paraphe, afin de réduire le nombre de candidats. Cette procédure restrictive n'avait pas empêché qu'il y ait 16 impétrants en lice lors du dernier scrutin présidentiel. Mais, cette fois, leur nombre risque d'être beaucoup plus restreint. D'abord, parce qu'il y a eu le 21 avril 2002, l'élimination de Jospin. Les partis refusent de s'exposer désormais à une si traumatisante mésaventure. « On ne veut pas être cocu et payer la chambre », lâche Hollande qui, cette fois, a passé un ordre qu'il réitère régulièrement : pas de signatures pour Besancenot ni pour Voynet.

A l'UMP et à l'UDF, on a fait passer des consignes identiques. Plus question de se livrer à ces sombres manœuvres de scribouilles et de gribouilles qui avaient permis d'empêcher la candidature de Pasqua - le RPR lui avait promis des signatures qui lui auraient été retirés au dernier moment – et de favoriser la présence de concurrents susceptibles d'affaiblir la gauche. C'est ainsi en effet que la radicale Christiane Taubira et l'écologiste Corinne Lepage avaient bénéficié de paraphes fournis par des missi dominici de l'Elysée, ainsi que Bruno Mégret qui, lui, devait mettre en difficulté censément Jean-Marie Le Pen.

Cette fois donc, promis juré, tout se passerait au grand jour. Ce qui effarouche, on s'en doute, les élus, en particulier les édiles de petites communes, qui se sont faits tancer par leurs administrés, parfois menacer, pour avoir signé en faveur de l'extrême droite mais aussi de l'extrême gauche. « Afin de préserver, l'harmonie du conseil municipal », beaucoup de petits maires gardent les mains dans les poches avec d'autant plus de détermination qu'ils dépendent, pour le financement de leurs travaux municipaux, de communautés de communes ou du conseil général, toutes instances où les partis font la pluie et le beau temps. En conséquence de quoi, beaucoup de prétendants ne disposent pas, aujourd'hui, du nombre de paraphes requis.

Certes, Arlette Laguiller prétend avoir franchi la barre de qualification des 500. Jean-Marie Le Pen aurait également passé ce seuil mais tout juste, et, pour se victimiser, il prétend que le compte n'y est pas encore. Mais tous les petits candidats « galèrent », comme ils disent, et sont victimes d'une double peine. D'abord le système électoral ne leur permet pas de bénéficier d'élus et donc d'argent. Ensuite, n'ayant ni notables, ni moyens financiers, ils ne peuvent participer à la mère de toutes les batailles politiques. Même les Verts de Dominique Voynet, qui ont pourtant des élus, brûlent de l'encens chaque matin devant les sacs postaux en priant que les Dieux de la nature soient généreux. Ceux-là, pourtant implantés, ne comptent pas plus de 449 signatures. Corinne Lepage en annonce 440, Nicolas Dupont-Aignan 430, Olivier Besancenot 455, Philippe de Villiers 430. Bref, tous sont dans la dernière ligne droite d'un marathon qui les a épuisés physiquement, psychologiquement et financièrement. Sans être sûrs, loin s'en faut, d'en sortir vainqueur.

À l'arrivée, il se pourrait tout à fait que les courants gaullistes, écologistes, souverainistes, altermondialistes voire trotskistes ne soient pas représentés, et que la démocratie censément pluraliste soit réduite à sa trop simple expression. C'était pour conjurer ce risque que les uns et les autres ont mobilisé leurs militants qui vont quadriller ces semaines à venir la campagne pour recueillir ces fameux formulaires de quatre pages à réexpédier au Conseil Constitutionnel dûment remplis. Pas raturés, pas tâchés, pas froissés ! Faute de quoi, ils sont annulés.

Certains maires renvoient directement leurs formulaires au Conseil, ce qui complique encore la tâche. Mais il faudra attendre sans doute jusqu'au 16 mars pour savoir qui sera, in fine, sélectionné et avec l'appui de qui. Car la perversion de ce système, c'est de mettre les petits dans la main des grands. C'est ainsi que certains maires de l'UMP ont fait savoir qu'ils aideraient volontiers Besancenot à se présenter rien que pour embêter Royal, et que d'autres songent à aider Lepage pour gêner Bayrou. Quant au PS, il a clairement signifié aux Verts qu'il leur accorderait ce qu'il faudrait… s'ils se montraient gentils, accommodants dans les futures négociations sur les législatives. Pas question, leur ont répondu Dominique Voynet et Cécile Duflot, la petite nouvelle. Mais dans quelques semaines, s'il leur manque 20-30 paraphes, pourront-ils encore refuser de signer avec le diable ?