Communiqué du 20 mars 2007

 

Sarkozy : un danger pour notre modèle républicain

 

Libres propos

Le modèle républicain français a deux facettes extrêmement importantes. La première facette de notre modèle, c’est la volonté de construire une communauté nationale unie et rassemblée autour de valeurs sans distinction de religion, de race… Cette appartenance à la communauté française donne alors des droits et des devoirs. La deuxième facette de notre modèle républicain, c’est la volonté de faire avancer en parallèle et sans distinction la justice sociale et la compétitivité de notre pays et de ses entrepreneurs (ce que l’on appelait la modernisation dans les années 60). Il y a fortement ancré chez nous la volonté de s’assurer que le progrès est partagé par tous et que la communauté nationale aide les plus faibles à s’en sortir.

L’article 3 de notre Constitution dit que notre République est « indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Pourtant, le ministre de l’intérieur a remis en cause la plupart de ces notions pendant près de 5 ans, notamment la laïcité. Non seulement, il a suggéré une réforme de la loi de 1905 sur la stricte séparation entre l’Etat et la religion, mais il a aussi écrit dans son livre « La République, les religions, l’espérance » que « l’on aurait tort de cantonner le rôle de l’église aux seuls aspects spirituels ». Et Nicolas Sarkozy pousse la logique de son communautarisme religieux jusqu’à mener campagne auprès de chaque communauté importante pour ses intérêts. Il s’adresse ainsi à la communauté juive, mais aussi à la communauté musulmane en suggérant que l’Etat pourrait participer au financement de mosquées, en créant le Conseil Français du Culte Musulman tout en veillant à rappeler qu’il est « de culture catholique, de tradition catholique et de confession catholique » !

Non seulement il essaie comme d’habitude d’être tout pour tout le monde, mais surtout, il contredit complètement les fondements de notre République en pratiquant ce ciblage religieux tant contraire à l’esprit laïque de nos institutions. La séparation de l’Etat et l’église est complètement bafouée. Et en suggérant comme il le fait que la religion peut être une solution pour les troubles des banlieues, il lie une alliance contre-nature pour l’Etat. Et cela est d’autant plus choquant que moins de 20% des Français pratiquent régulièrement une religion. L’action de Nicolas Sarkozy est contraire à la tradition mais aussi à la pratique française.

Et cela renvoie la politique à une forme de clientélisme où l’homme politique s’adresse à chaque petit morceau de notre communauté avec des mesures spécifiques au lieu de propose une vision d’ensemble. Une telle démarche est dangereuse car elle ne peut qu’aboutir à une fragmentation de notre communauté nationale. Et cela est d’autant plus dommageable que les liens entre Français sont beaucoup plus forts que dans presque tous les autres grands pays occidentaux (Etats-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Italie et Espagne par exemple). Dans tous ces pays, l’équilibre entre la nation et les communautés qui la composent est instable et aboutit à une perte de conscience de la notion d’intérêt général et à une dilution de l’identité nationale.

Même si le candidat de l’UMP a modéré son projet sur les questions religieuses dans cette campagne, il a conservé le ton qui était le sien concernant la société française. Dans tous ses discours, on retrouve le partage simpliste entre une « France qui travaille et se lève tôt » et une qui profiterait de l’Etat. Comme d’habitude, on retrouve une vision en noir et blanc, sans la moindre nuance. Dans une position très américaine, Nicolas Sarkozy sous-entend que les Français qui font des efforts s’en sortent forcément et que tous ceux qui ne s’en sortent pas sont des feignants, qui, de facto, se lèvent tard. Une telle vision n’est pas normale de la part d’un postulant à la Président de la République. Elle montre une déconnection complète avec la réalité de la vie de certains de nos compatriotes. Si bien sûr, notre système comprend des failles dont une minorité profite et qu’il convient donc de réformer, beaucoup de Français souffrent d’accidents de la vie et il est du rôle de l’Etat de les aider et non de les stigmatiser. Pensons aux victimes de licenciements peu qualifiées qui ont travaillé plus de 20 ans dans la même entreprise et qui gagnent à peine plus que le SMIC. Nicolas Sarkozy semblent les tenir pour quantité négligeable tant ils ne cadrent pas avec sa vision simpliste du pays. Pourtant, il s’agit d’un enjeu crucial alors que le capitalisme moderne devient chaque jour plus violent pour les plus petits.

La France s’est construite avec un modèle républicain original, un modèle qui permet une unité nationale que beaucoup peuvent nous envier, un modèle qui refuse les excès du libéralisme. Ce modèle fait notre identité. Nicolas Sarkozy veut le remettre en cause pour se rapprocher d’un modèle américain qui ne nous correspond pas et qui a beaucoup de limites.

Laurent Pinsolle

Jeunes Gaullistes pour la Vème République