Communiqué du 05 janvier 2007

 

Les vœux présidentiels en forme de testament…

 
  • 2007 a débuté, pour le Président Jacques Chirac, par une mise au point à destination de ceux qui aspirent à quitter le bateau gouvernemental avant son escale finale.

Pris dans le seul contexte des vœux précédant une échéance politique fondamentale dans notre système démocratique, le discours du Président n'a rien d'exceptionnel : travailler jusqu'au terme du mandat que les Français lui ont confié, avec le gouvernement qu'il a constitué à cette fin, ne devrait être que pure logique ! Mais attention ! Personne ne doit se laisser "bouffer" par la campagne. "L'engagement dans le débat électoral ne saurait en aucun cas s'exercer au détriment de la mission gouvernementale" prévient-il. Sera-t-il entendu ? N'aurait-il pas dû ajouter "… et des finances publiques" tant il est vrai qu'il est difficile de cerner la distinction entre activités purement ministérielles et celles à mettre au compte du "militantisme politique partisan".

Quoi qu'il en soit, ces derniers vœux du Président Chirac (sauf candidature surprise suivie d'une victoire très aléatoire dans le contexte actuel) ont été l'occasion d'aborder certains thèmes touchant à l'organisation de la vie politique : la solidarité gouvernementale et la constitution de la Vème république.

La solidarité gouvernementale

Depuis son origine en 1958, mais certainement accentuée par la mise en œuvre de l'élection présidentielle au suffrage universel, la solidarité gouvernementale est un des fondements essentiels de notre constitution. En conséquence, les politiques et actions déterminées et menées par chacun des ministres sont à mettre à l'actif de tous. Il est particulièrement indécent de s'annoncer opposé à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, d'être contre la privatisation de GDF, de brocarder la banque centrale européenne et sa politique de l'Euro fort tout en étant le premier ministre bis du gouvernement qui a pris des décisions contraires.

Le Président qui oriente, le Premier ministre qui coordonne et les ministres qui mettent en œuvre sont coresponsables du bilan qu'il faudra bien inviter au cours de la campagne présidentielle. Ils ne peuvent s'en soustraire.

La République gaullienne en héritage

Sous la IVème République, et sans que ceci ne puisse mettre en cause les capacités des Hommes politiques, si un ministre s'enrhumait, le gouvernement tombait. Quel soulagement que de Gaulle soit passé par là. Mais prenons garde ! La tentation est grande pour certains de revenir aux "délices anciens". Jacques Chirac veut être le défenseur des institutions gaulliennes, et répète ce que chacun sait déjà : cette constitution a fait ses preuves depuis près d'un demi-siècle, elle a permis à la France de sortir de situations aussi diverses que difficiles. Personne ne doit la toucher clame-t-il cérémonieusement lors des vœux du Conseil Constitutionnel, sinon au risque de "brader l'héritage", gaulliste suppose-t-on, à l'adresse des principaux candidats à l'élection présidentielle ayant en point de mire une VIème République, clone de la feu IVème.

Chirac pompier pyromane

Mais les Français n'ont pas oublié les coups terribles portés à notre loi suprême par celui qui se présente aujourd'hui comme le gardien du temple :

En 1986, qui a accepté, sans aucune obligation institutionnelle, de "jouer" la cohabitation avec François Mitterrand, Président en exercice battu lors des législatives ? Chirac, nouveau Premier ministre de Mitterrand, après avoir été celui de Giscard.

En 2000, qui a pris l'initiative de réduire le mandat présidentiel à 5 ans, à l'identique de celui des députés ? Chirac, répondant ainsi aux pressions communes et orchestrées des Giscardiens, des socialistes et des centristes.

En 2005, qui a transformé le référendum en outil anti-démocratique ? Chirac qui, dans un premier temps, ne tire aucune leçon de son échec pour lui-même et sa politique européenne, et dans un second, poursuit, sans prendre en considération les 55% de "non", l'élargissement comme si de rien n'était.

Et en 2007, avant de quitter la scène politique, qui tente encore de rajouter à notre constitution quelques "artifices rédactionnels" pour faire croire qu'il gouverne encore "librement", alors que le peuple n'a pas été informé des desseins présidentiels de dernière heure ? Chirac.

Alain KERHERVE