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Par Jacques Cheminade
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* Président de Solidarité et Progrès
site :
www.solidariteetprogres.org
Dans le cadre de l'examen du projet de loi
sur l'énergie, la fusion de Gaz de France (GDF) et de Suez, et par
conséquent la privatisation de GDF, sera à l'ordre du jour du Parlement
le 7 septembre 2006. Personne ne sait exactement dans quelles
conditions, tant les débats sont confus et les influences activées, mais
toutes les options envisagées sont inacceptables et toutes les raisons
données fausses ou mauvaises.
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Cette opération se situe dans le
contexte général d'une prise de contrôle de l'économie française
(Arcelor, Euronext, Alcatel...) par les intérêts d'une oligarchie
financière transnationale et du démantèlement de notre service
public. La fusion Suez-GDF n'est pas ainsi un cas particulier mais
un symptôme d'une politique de soumission plus générale, frappant
notamment les sociétés du CAC-40 avec la complicité de nos
« élites », qui estiment appartenir à un monde échappant à la morale
commune.
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Dans cette affaire, l'Etat se renie
lui-même : la loi Sarkozy de 2004 prévoyait en effet que l'Etat
devait détenir au moins 70% du capital de GDF. Aujourd'hui, on
demande au Parlement de voter une autre loi pour abaisser cette
part. Peu importe le chiffre finalement retenu, c'est cette baisse
qui est scandaleuse et qui constitue un reniement. Directeur de
cabinet adjoint de Jean-Pierre Raffarin et ancien conseiller
économique de l'Elysée, M. Jean-François Cirelli a lui-même
supervisé la loi Sarkozy de 2004 pour ensuite, nommé à la tête de
GDF, tirer avantage de son influence pour la faire modifier,
bafouant tous les critères de rigueur et d'honnêteté intellectuelle.
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Suez, qui absorbera GDF, est une
société internationale dont les principaux actionnaires relèvent
d'une oligarchie sans frontières : Albert Frère, Paul Desmarais, le
vicomte Etienne Davignon, Lord Simon of Highbury et Anne Lauvergeon.
Gérard Mestrallet lui-même, son actuel patron, a accepté en 2002 le
plan d'austérité qui lui était alors imposé par Félix Rohatyn,
ancien ambassadeur des Etats-Unis en France et « père » des
fusions-acquisitions depuis les années soixante, c'est à dire de la
re-cartellisation de l'économie mondiale. Mestrallet et Rohatyn sont
des partisans acharnés de « l'investissement transatlantique »,
qu'ils ont promu à la conférence du groupe Europlace qui s'est tenue
à New York en octobre 2004.
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MM. Mestrallet et de Villepin évoquent
« l'indépendance énergétique de la France. » M. Mestrallet se vante
de « l'addition des portefeuilles de contrats et des positions dans
l'exploration et la production. » qui ferait de Suez-GDF le premier
acheteur et le premier fournisseur de gaz européen. C'est ainsi
définir une re-cartellisation financière, non une indépendance
énergétique et industrielle. M. Mestrallet se flatte également, en
détenant une flotte de 16 méthaniers et 5 terminaux gaziers, de
pouvoir contrer le transport classique par pipe-line, c'est à dire
la dépendance vis à vis des pays producteurs d'hydrocarbures
(Algérie et Russie). C'est là décrire un rapport de forces, non un
horizon de développement mutuel, d'entente et de coopération.
De plus, l'indépendance énergétique de la France ne dépend pas à
vrai dire du gaz, mais du nucléaire. Or Mme Anne Lauvergeon a fait
nommer le néo-conservateur américain Spencer Abraham à la tête de la
filière états-unienne d'Areva. Elle a ainsi remis les clefs de
l'industrie nucléaire française à un ancien Secrétaire d'état
états-unien à l'énergie, de surcroît membre de la Société
Fédéraliste, qui justifie la théorie des pleins pouvoirs de la
présidence américaine Bush-Cheney et le caractère légal des
tribunaux d'exception.
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Diverses garanties sont promises en
faveur des acheteurs publics ou privés, allant de la poursuite des
missions de service public jusqu'au maintien des tarifs régulés et
la possibilité d'y revenir pour les PME qui n'y auront plus
théoriquement accès à partir de fin 2007, ainsi qu'à la création
d'un tarif spécial du gaz pour les plus démunis. Le problème est que
ces garanties n'engagent que ceux qui y croient, comme hier les
promesses de M. Pasqua ou celles de M. Sarkozy en 2004, car toute la
logique de démission publique suivie va logiquement à leur encontre.
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EDF se trouvera elle-même menacée :
hier elle avait deux grands concurrents en France, GDF et Suez,
demain elle se trouvera face à un géant sous contrôle de
l'oligarchie financière. EDF devra donc se diversifier pour survivre
et s'adosser à un partenaire en ouvrant son capital. Le candidat
pourrait être Veolia ou Total, des entreprises nominalement
françaises mais en fait, elles aussi, sous l'influence directe de
l'oligarchie financière mondialisée.
Bref, cette fusion contredit tous les beaux
discours sur l'indépendance économique et sur la belle et grande Europe
intégrée. Les banques impliquées dans le projet de fusion sont Merrill
Lynch, Lazard, Goldman Sachs et la Société Générale pour GDF,
Rothschild, BNP Paribas, Morgan Stanley, JP Morgan, le Crédit Agricole
et Toulouse associés (rachetée par Gerardo Braggiotti, ex administrateur
d'Eurazeo et directeur-gérant de Lazard, devenu dirigeant du Gruppe
Banca Leonardo, avec l'appui d'Eurazeo et de Michel David-Weill) pour
Suez. D'autres maisons restées à l'écart de l'opération préparent des
contre-projets, au sein d'un véritable bal de requins n'ayant d'autre
logique que les rapports de force ou la volonté de puissance.
Nous disons « non », un non absolu à cette
entreprise de liquidation de notre service public, des intérêts de nos
consommateurs et de notre indépendance nationale. Un virage à 180° de
politique est nécessaire, pour remettre en place des institutions
susceptibles de nous défendre (banque nationale, planification
indicative, contrôle des flux de capitaux, protectionnisme intelligent),
dans la cadre d'un nouvel ordre financier et monétaire international --
un Nouveau Bretton Woods -- remettant l'argent au service de la
production, du travail, des infrastructures et de la recherche.
Dans ce contexte, qui lui donne un sens,
nous exigeons la mise en place d'un grand pôle public de l'énergie,
regroupant les moyens et les activités d'EDF et de GDF.
Sans cette nouvelle politique, qui
s'inscrit dans notre tradition républicaine, cette politique pour
laquelle Jacques Cheminade se bat dans le cadre de la campagne
présidentielle, la France perdra tout moyen de demeurer un
état-nation et deviendra
au mieux, avec Euronext et le New York Stock Exchange regroupés sous
l'égide de Félix Rohatyn, un Liban financier voué à l'austérité sociale
dans un monde livré à une guerre irrégulière permanente de tous contre
tous.
DITES NON AVEC NOUS A LA
PRIVATISATION DE GDF, NON AU CHAOS FINANCIER, NON A UNE MONDIALISATION
DE PREDATEURS !
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