Ce mercredi 16
mai 2007, Nicolas Sarkozy succède à Jacques Chirac et devient le 6ème
Président de la 5ème République.
Dans sa première
allocution officielle, il souffle le chaud et le froid.
Une posture
gaulliste
Sa volonté de
rassembler tous les Français car " la France n'est forte que lorsqu'elle
est unie" est manifeste, au moins dans les propos ; préserver
l'indépendance et l'identité de la France, tout autant ; une politique
étrangère basé sur un triptyque : une Europe qui protège, l'union de la
méditerranée et le développement de l'Afrique. Mais les mots ne sont pas
des actes, alors attendons !
Tacle par
derrière : carton rouge
Mais ces propos
encourageants ne sauraient cacher le reste. A peine la poignée de main
"fraternelle" échangée, l'attaque sur le bilan de Jacques Chirac ne
s'est pas fait attendre : non respect de la parole donnée et des
engagements ; crise des valeurs jamais aussi profonde ; intolérance et
sectarisme jamais aussi destructeurs ; immobilisme dangereux pour la
France ; ordre et autorité bafoués, injustices de plus en plus
insupportables… Ségolène n'aurait pas mieux fait.
Qu'a-t-il fait
pendant 5 ans ?
Manifestement le
nouveau Président fait table rase du passé, y compris le sien. Les cinq
dernières années, il a été un ministre éminent de Jacques Chirac. Il
pourrait, pour le moins, en assumer l'héritage.
L'Europe va mal
Nicolas
Sarkozy souhaite rassembler les Français, mais il désigne à son tour les
moutons noirs ; ils sont responsables de la panne européenne. Il propose
d'aller vite vers ce mini-traité européen ratifié par le seul parlement.
Sa visite expresse auprès d'Angela Merkel illustre cette volonté…
affaire à suivre !
Alain KERHERVE
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Allocution
de Nicolas Sarkozy
Mesdames et
Messieurs,
En ce jour où je prends officiellement mes fonctions de Président de la
République française, je pense à la France, ce vieux pays qui a traversé
tant d'épreuves et qui s'est toujours relevé, qui a toujours parlé pour
tous les hommes et que j'ai désormais la lourde tâche de représenter aux
yeux du monde.
Je pense à tous les Présidents de la Ve République qui m'ont précédé.
Je pense au Général De Gaulle qui sauva deux fois la République, qui
rendit à la France sa souveraineté et à l'Etat sa dignité et son
autorité.
Je pense à Georges Pompidou et à Valéry Giscard d'Estaing qui, chacun à
leur manière, firent tant pour que la France entrât de plain-pied dans
la modernité.
Je pense à François Mitterrand, qui sut préserver les institutions et
incarner l'alternance politique à un moment où elle devenait nécessaire
pour que la République soit à tous les Français.
Je pense à Jacques Chirac, qui pendant douze ans a œuvré pour la paix et
fait rayonner dans le monde les valeurs universelles de la France. Je
pense au rôle qui a été le sien pour faire prendre conscience à tous les
hommes de l'imminence du désastre écologique et de la responsabilité de
chacun d'entre eux envers les générations à venir.
Mais en cet instant si solennel, ma pensée va d'abord au peuple français
qui est un grand peuple, qui a une grande histoire et qui s'est levé
pour dire sa foi en la démocratie, pour dire qu'il ne voulait plus
subir. Je pense au peuple français qui a toujours su surmonter les
épreuves avec courage et trouver en lui la force de transformer le
monde.
Je pense avec émotion à cette attente, à cette espérance, à ce besoin de
croire à un avenir meilleur qui se sont exprimés si fortement durant la
campagne qui vient de s'achever.
Je pense avec gravité au mandat que le peuple français m'a confié et à
cette exigence si forte qu'il porte en lui et que je n'ai pas le droit
de décevoir.
Exigence de rassembler les Français parce que la France n'est forte que
lorsqu'elle est unie et qu'aujourd'hui elle a besoin d'être forte pour
relever les défis auxquels elle est confrontée.
Exigence de respecter la parole donnée et de tenir les engagements parce
que jamais la confiance n'a été aussi ébranlée, aussi fragile. Exigence
morale parce que jamais la crise des valeurs n'a été aussi profonde,
parce que jamais le besoin de retrouver des repères n'a été aussi fort.
Exigence de réhabiliter les valeurs du travail, de l'effort, du mérite,
du respect, parce que ces valeurs sont le fondement de la dignité de la
personne humaine et la condition du progrès social.
Exigence de tolérance et d'ouverture parce que jamais l'intolérance et
le sectarisme n'ont été aussi destructeurs, parce que jamais il n'a été
aussi nécessaire que toutes les femmes et tous les hommes de bonne
volonté mettent en commun leurs talents, leurs intelligences, leurs
idées pour imaginer l'avenir.
Exigence de changement parce que jamais l'immobilisme n'a été aussi
dangereux pour la France que dans ce monde en pleine mutation où chacun
s'efforce de changer plus vite que les autres, où tout retard peut être
fatal et devient vite irrattrapable.
Exigence de sécurité et de protection parce qu'il n'a jamais été aussi
nécessaire de lutter contre la peur de l'avenir et contre ce sentiment
de vulnérabilité qui découragent l'initiative et la prise de risque.
Exigence d'ordre et d'autorité parce nous avons trop cédé au désordre et
à la violence, qui sont d'abord préjudiciables aux plus vulnérables et
aux plus humbles.
Exigence de résultat parce que les Français en ont assez que dans leur
vie quotidienne rien ne s'améliore jamais, parce que les Français en ont
assez que leur vie soit toujours plus lourde, toujours plus dure, parce
que les Français en ont assez des sacrifices qu'on leur impose sans
aucun résultat.
Exigence de justice parce que depuis bien longtemps autant de Français
n'ont pas éprouvé un sentiment aussi fort d'injustice, ni le sentiment
que les sacrifices n'étaient pas équitablement répartis, ni que les
droits n'étaient pas égaux pour tous.
Exigence de rompre avec les comportements du passé, les habitudes de
pensée et le conformisme intellectuel parce que jamais les problèmes à
résoudre n'ont été aussi inédits.
Le peuple m'a confié un mandat. Je le remplirai. Je le remplirai
scrupuleusement, avec la volonté d'être digne de la confiance que m'ont
manifesté les Français.
Je défendrai l'indépendance et l'identité de la France.
Je veillerai au respect de l'autorité de l'Etat et à son impartialité.
Je m'efforcerai de construire une République fondée sur des droits réels
et une démocratie irréprochable.
Je me battrai pour une Europe qui protège, pour l'union de la
Méditerranée et pour le développement de l'Afrique.
Je ferai de la défense des droits de l'homme et de la lutte contre le
réchauffement climatique les priorités de l'action diplomatique de la
France dans le monde.
La tâche sera difficile et elle devra s'inscrire dans la durée.
Chacun d'entre vous à la place qui est la sienne dans l'Etat et chaque
citoyen à celle qui est la sienne dans la société ont vocation à y
contribuer.
Je veux dire ma conviction qu'au service de la France il n'y a pas de
camp. Il n'y a que les bonnes volontés de ceux qui aiment leur pays. Il
n'y a que les compétences, les idées et les convictions de ceux qui sont
animés par la passion de l'intérêt général.
A tous ceux qui veulent servir leur pays, je dis que je suis prêt à
travailler avec eux et que je ne leur demanderai pas de renier leurs
convictions, de trahir leurs amitiés et d'oublier leur histoire. A eux
de décider, en leur âme et conscience d'hommes libres, comment ils
veulent servir la France.
Le 6 mai il n'y a eu qu'une seule victoire, celle de la France qui ne
veut pas mourir, qui veut l'ordre mais qui veut aussi le mouvement, qui
veut le progrès mais qui veut la fraternité, qui veut l'efficacité mais
qui veut la justice, qui veut l'identité mais qui veut l'ouverture.
Le 6 mai il n'y a eu qu'un seul vainqueur, le peuple français qui ne
veut pas renoncer, qui ne veut pas se laisser enfermer dans
l'immobilisme et dans le conservatisme, qui ne veut plus que l'on décide
à sa place, que l'on pense à sa place.
Eh bien, à cette France qui veut continuer à vivre, à ce peuple qui ne
veut pas renoncer, qui méritent notre amour et notre respect, je veux
dire ma détermination à ne pas les décevoir.
Vive la République ! Vive la France ! |