En m'adressant à vous ce soir, dans
ce moment qui est, chacun le comprend, exceptionnel dans la vie
d'un homme, je ressens une immense émotion.
J'éprouve depuis mon plus jeune âge
la fierté indicible d'appartenir à une grande, vieille et belle
nation, la France. Je l'aime comme on aime les êtres chers qui
nous ont tout donné. Maintenant c'est à mon tour de tout lui
donner.
Ce
soir ma pensée va aux millions de Français qui aujourd'hui m'ont
témoigné leur confiance. Je veux leur dire qu'ils m'ont fait le
plus grand honneur qui soit à mes yeux en me jugeant digne de
présider aux destinées de la France.
Ma pensée va à tous ceux qui m'ont
accompagné dans cette campagne. Je veux leur dire ma gratitude
et mon affection.
Ma pensée va à Madame Royal. Je veux
lui dire que j'ai du respect pour elle et pour ses idées dans
lesquelles tant de Français se sont reconnus.
Ma pensée va à tous les Français qui
n'ont pas voté pour moi. Je veux leur dire que par-delà le
combat politique, par-delà les divergences d'opinions, il n'y a
pour moi qu'une seule France.
Je veux leur dire que je serai le
Président de tous les Français, que je parlerai pour chacun
d'entre eux. Je veux leur dire que ce soir, ce n'est pas la
victoire d'une France contre une autre. Il n'y a pour moi ce
soir qu'une seule victoire, celle de la démocratie, celle des
valeurs qui nous unissent, celle de l'idéal qui nous rassemble.
Ma priorité sera de tout mettre en œuvre pour que les Français
aient toujours envie de se parler, de se comprendre, de
travailler ensemble.
Le peuple français s'est exprimé. Il
a choisi de rompre avec les idées, les habitudes et les
comportements du passé. Je veux réhabiliter le travail,
l'autorité, la morale, le respect, le mérite. Je veux remettre à
l'honneur la nation et l'identité nationale. Je veux rendre aux
Français la fierté d'être Français. Je veux en finir avec la
repentance qui est une forme de haine de soi, et la concurrence
des mémoires qui nourrit la haine des autres.
Le peuple français a choisi le
changement. Ce changement je le mettrai en œuvre parce que c'est
le mandat que j'ai reçu du peuple et parce que la France en a
besoin. Mais je le ferai avec tous les Français. Je le ferai
dans un esprit d'union et de fraternité. Je le ferai sans que
personne n'ait le sentiment d'être exclu, d'être laissé pour
compte. Je le ferai avec la volonté que chacun puisse trouver sa
place dans notre République, que chacun s'y sente reconnu et
respecté dans sa dignité de citoyen et dans sa dignité d'homme.
Tous ceux que la vie a brisés, ceux que la vie a usés doivent
savoir qu'ils ne seront pas abandonnés, qu'ils seront aidés,
qu'ils seront secourus. Ceux qui ont le sentiment que quoi
qu'ils fassent ils ne pourront pas s'en sortir doivent être sûrs
qu'ils ne seront pas laissés de côté et qu'ils auront les mêmes
chances que les autres.
J'appelle tous les Français par-delà
leurs partis, leurs croyances, leurs origines, à s'unir à moi
pour que la France se remette en mouvement.
J'appelle chacun à ne pas se laisser
enfermer dans l'intolérance et dans le sectarisme, mais à
s'ouvrir aux autres, à ceux qui ont des idées différentes, à
ceux qui ont d'autres convictions.
Je veux lancer un appel à nos
partenaires européens, auxquels notre destin est lié, pour leur
dire que toute ma vie j'ai été européen, que je crois en la
construction européenne et que ce soir la France est de retour
en Europe. Mais je les conjure d'entendre la voix des peuples
qui veulent être protégés. Je les conjure de ne pas rester
sourds à la colère des peuples qui perçoivent l'Union Européenne
non comme une protection mais comme le cheval de Troie de toutes
les menaces que portent en elles les transformations du monde.
Je veux lancer un appel à nos amis
Américains pour leur dire qu'ils peuvent compter sur notre
amitié qui s'est forgée dans les tragédies de l'Histoire que
nous avons affrontées ensemble. Je veux leur dire que la France
sera toujours à leurs côtés quand ils auront besoin d'elle. Mais
je veux leur dire aussi que l'amitié c'est accepter que ses amis
puissent penser différemment, et qu'une grande nation comme les
Etats-Unis a le devoir de ne pas faire obstacle à la lutte
contre le réchauffement climatique, mais au contraire d'en
prendre la tête parce que ce qui est en jeu c'est le sort de
l'humanité tout entière.
Je veux lancer un appel à tous les
peuples de la Méditerranée pour leur dire que c'est en
Méditerranée que tout se joue, et que nous devons surmonter
toutes les haines pour laisser la place à un grand rêve de paix
et de civilisation. Je veux leur dire que le temps est venu de
bâtir ensemble une Union Méditerranéenne qui sera un trait
d'union entre l'Europe et l'Afrique.
Je veux lancer à tous les Africains
un appel fraternel pour leur dire que nous voulons les aider à
vaincre la maladie, la famine et la pauvreté et à vivre en paix.
Je veux leur dire que nous déciderons ensemble d'une politique
d'immigration maîtrisée et d'une politique de développement
ambitieuse.
Je veux lancer un appel à tous ceux
qui dans le monde croient aux valeurs de tolérance, de liberté,
de démocratie et d'humanisme, à tous ceux qui sont persécutés
par les tyrannies et par les dictatures, à tous les enfants et à
toutes les femmes martyrisés dans le monde pour leur dire que la
France sera à leurs côtés, qu'ils peuvent compter sur elle.
Mes chers compatriotes, nous allons
écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire. Je suis sûr
qu'elle sera grande et belle, et du fond du cœur ce soir je vous
dis :
Vive la République ! Vive la France
! »