Communiqué
du 05 février 2006 |
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Aujourd’hui nous
sommes Danois. |
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Par
Jean-Noël AMADEI
Aujourd’hui nous
sommes Danois.
Peu à peu, la
publication en septembre dernier par le Jyllands-Posten, quotidien
danois, de caricatures de Mahomet a déclenché une vague progressive de
protestations dans certains pays arabes et dans les milieux islamistes.
Quelle que puisse
être l’appréciation de la qualité des caricatures, et certaines ne
brillent certes pas par leur finesse, le fond du problème est le
fossé d’incompréhension entre des pays européens où la liberté de pensée
est de droit, et les pays où la foi de certains a valeur de seule loi.
S’il fallait une
seule raison aux lois assurant la séparation des Églises et de l’État,
elle est présente dans cette affaire ! rien ne justifie, nulle part, que
l’on impose à des non-croyants les interdits des croyants, qu’ils soient
chrétiens, musulmans, juifs, bouddhistes ou se réclament de je ne sais
quelle religion. Nous vivons dans les rares pays où la presse est
supposée pouvoir s’exprimer librement, avec les limites naturelles
fixées par les lois sur la diffamation. Il est dès lors de la
responsabilité d’un journal de publier telle ou telle opinion, telle ou
telle image, telle ou telle caricature. Le propriétaire de France Soir
ne se grandit pas, loin de là, en révoquant hier son directeur de la
publication pour avoir osé laisser le journal affirmer à cette occasion
les principes de liberté d’expression. C’est la clause de conscience à
l’envers, on ne quitte pas un journal parce qu’on est en désaccord avec
sa ligne éditoriale, on en est viré parce qu’on risque de déplaire à des
extrémistes religieux !
L’amalgame fait par
ces exemples de tolérance que sont Les Frères Musulmans, le Djihad
Islamique et des ministres d’états proche orientaux, célèbres pour leur
démocratie très relative, entre un journal indépendant et un État libre,
entre le Jyllands-Posten et le Danemark est tout bonnement intolérable :
pourquoi un Etat serait-il obligé de battre sa coulpe pour les torts
supposés d’un de ses ressortissants, qu’est-ce que cette notion de
responsabilité collective ? où cela s’arrêtera-t-il ?
Au nom de quoi ceux
qui n’accordent aucune liberté d’expression aux gens qui sont sous leur
responsabilité se permettent-ils d’exiger des démocraties que l’on bride
ce qui est un acquis fondamental de nos sociétés ? c’est l’héritage de
Voltaire, de Beaumarchais que l’on insulte. Principes pour principes,
celui de liberté de conscience, celui de liberté d’expression, sont
imprescriptibles, même si elles doivent avoir pour corollaire la
tolérance et le respect des croyances et religions d’autrui, c’est cela
la laïcité.
Fallait-il ou non
publier ces caricatures ? les responsables du journal concerné sont les
seuls à pouvoir répondre en conscience, nul ne saurait leur dicter a
posteriori la conduite qu’ils auraient du adopter.
Maintenant que c’est
fait, maintenant qu’en outre Jyllands-Posten a présenté ses excuses
(acceptées par les groupes musulmans danois) aux musulmans qui auraient
pu se sentir offensés, la seule chose que l’on puisse faire, que l’on
doive faire, est de soutenir l’indépendance de la presse.
De même que l’on peut
respecter les croyants dans leur diversité sans demander que l’on
applique à tous l’ensemble de leurs interdits, de même on peut respecter
l’indépendance de la presse dans sa diversité sans agréer à tout ce qui
est publié dans tous les journaux. Et puisque les ministres européens des affaires étrangères ont ressenti le besoin légitime de soutenir le gouvernement danois dans cette affaire, qu’il nous soit permis de saluer le peuple danois, et de lui affirmer notre totale solidarité ! Vi er Dansker i dag !
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