Mis en ligne le 03 juin 2006 |
A l'Élysée, le Général reçoit M. Pompidou, son Premier ministre. Il lui annonce, enfin ! : "Voilà, j'ai décidé d'être candidat" Le pays est informé le soir même à 20 heures par une allocution télévisée. "Il y a vingt-cinq ans, lorsque la France roulait dans l'abîme, j'ai cru devoir assumer la charge de la conduire jusqu'à ce qu'elle fût libérée.. Il y a sept ans, j'ai cru devoir revenir à sa tête pour la préserver de la guerre civile... Depuis lors, j'ai cru devoir exercer les pouvoirs de chef de l'État. Aujourd'hui, je crois devoir me tenir prêt à poursuivre ma tâche, mesurant en connaissance de cause de quel effort il s'agit." Sur un ton émouvant, il conclu : "En élisant le président de la République, il vous sera donné de fixer, en conscience, par-dessus toutes les sollicitations des tendances partisanes, des influences étrangères et des intérêts particuliers, la route que va suivre le France..."
C'est à Colombey, où il est arrivé la veille pour voter, que le général de Gaulle a appris, à 20 heures, qu'il était mis en ballottage. Il réalise 44, 7% des suffrages. (François Mitterrand[1] 32%, Jean Lecanuet[2] 15,6% et Jean-Louis Tixier Vignancour[3] 5,2%) comme le laissaient prévoir les derniers sondages. Face à un tel score, tout autre que le Général se serait réjoui. Il fait planer la menace d'un retrait auprès de ses collaborateurs. Mais ils n'ont aucun mal à le convaincre de se maintenir en lui faisant admettre qu'une présidentielle n'est pas un référendum et qu'un tel score est inespéré par rapport au nombre de candidats.
Les trois entretiens que le Général a accordés à Michel Droit, directeur au Figaro Littéraire, seront télévisés. Ils nous montrent un de Gaulle au meilleur de sa forme, multipliant les bons mots qui ont contribué à son succès ; notamment sur ces famille désunies où "le mari s'en va bambocher, [où] les garçons mettent les pieds sur les tables et [où] les filles ne rentrent pas la nuit". La forme de ces entretiens, destiné à compenser la prestation télévisée précédente surprend. Michel Droit s'y montre direct, et le Général manifeste, à 75 ans, une vitalité surprenante que peu lui prêtaient encore. Le second tour se joue en partie lors de ces entretiens télévisés.
Désigné par un collège de grands électeurs en 1958 conformément à la constitution d'origine, Charles de Gaulle est maintenant le premier Président de la République à être élu au suffrage universel depuis Louis-Napoléon Bonaparte en 1848. Le mode de scrutin et l'intérêt politique de cette consultation se traduisent par une participation exceptionnelle : 85% Il bat François Mitterrand, qui refuse de féliciter son vainqueur, avec 44,9% des suffrages exprimés, malgré les soutiens apportés à ce dernier, soutiens allant du Parti Communiste à l'extrême droite obéissant à un seul mot d'ordre : se débarrasser de de Gaulle.
[1] François Mitterrand est appuyé par la SFIO (Socialiste), le PCF et le Parti Radical. [2] Jean Lecanuet représente la famille Démocratie Chrétienne. [3] J.L. Tixier Vignancour représente l'extrême droite nostalgique de l'Algérie Française. |